1  UN APPARTEMENT à NEW YORK

 

Menley Weaver grimpe les escaliers menant à son appartement avec allégresse. Elle porte un sac de provision dans les bras tout en arborant un sourire radieux. En arrivant sur le seuil de son appartement, elle ouvre la porte. L'appartement est petit. On découvre un salon. Au milieu, un canapé vert et une petite table de salon. A gauche, des escaliers. Toujours son sac à la main, Menley allume la télévision qui se trouve en face du canapé, et appelle :

 

MENLEY : Frank… Frank…

 

Elle se dirige vers l'escalier et regarde en haut.

 

MENLEY : Frank… tu es là ?

 

Elle hausse les épaules et va à la cuisine. Elle dépose le sac sur la table et prend une pomme qu'elle croque à pleines dents. Elle retourne dans le salon et se vautre sur le canapé tout en mangeant sa pomme. Tout en zappant les chaînes de la télévision, son attention se porte soudain sur un morceau de papier se trouvant sur la télévision. Elle va le chercher et se rassoit sur le canapé. La lettre dit ceci :

" Ma chérie. J'ai beaucoup réfléchi à notre situation. Ces deux mois passés avec toi ont été les plus merveilleux de toute ma vie. Je ne les oublierai jamais. Mais je dois m'en aller maintenant. Je ne veux surtout pas te faire souffrir, mais notre amour est impossible. Un jour tu comprendras que j'ai pris la meilleure décision possible pour nous deux en quittant New York. Je te souhaite tout le bonheur possible. Je t'aime. Frank "

A la fin de la lecture, Menley pose sa tête contre le dos du canapé. Des larmes coulent sur son visage. On dirait qu'elle n'entend pas le téléphone sonner. Elle ne bouge pas. Le répondeur se met en route.

 

REPONDEUR : " Vous êtes bien chez Menley et je suis heureuse. Parlez après le bip… "

" Mlle Weaver, ici Alice Judical, directrice de l'Unecain Garden Place School. J'ai une bonne nouvelle pour vous. Votre candidature a été retenue pour le poste de titulaire. Bouclez vite vos valises et prenez le premier avion. Nous vous attendons avec impatience. Félicitations. Vous allez enseigner l'anglais dans une des plus prestigieuses école de ce pays ".

Menley reste toujours la tête adossée contre le canapé.

 

 

 GÉNÉRIQUE DE DéBUT

 

 

 2  L'AÉROPORT DE LOS ANGELES

 

Nous voici dans l'enceinte de l'aéroport. Les voyageurs se bousculent. Une jeune femme d'une trentaine d'années tient une pancarte avec l'inscription " Unecain ". Il s'agit de Lacey Calvin, qui se fraye un passage parmi la foule. Elle cherche quelqu'un du regard. Menley arrive alors vers elle et lui tend la main.

 

MENLEY : Bonjour, je suis Menley Weaver.

 

LACEY : Et moi Lacey Calvin. Prof de musique. Enfin… j'essaye. Vraiment ravie de faire votre connaissance. Vous avez fait bon voyage ?

 

MENLEY : Un peu fatigant. Traverser tout le pays en avion n'est vraiment pas ce que je préfère au monde.

 

LACEY : Oui, je vois. Moi c'est la même chose. Je déteste l'avion… sauf si le stewart ressemble à Brad Pitt.

 

Lacey lui fait un clin d'œil et Menley rit.

 

MENLEY : Pas de chance. Le stewart était blonde, mesurait 1m50 et devait avoir dans les 50 ans.

 

LACEY : Alors là, je vous plains. Vous tapez toutes ces heures d'avion sans vous rincer l'œil !… Allez, venez. Nous allons chercher vos bagages et je vous emmène à votre appartement.

 

 

 3  DANS L'IMMEUBLE GARDEN VIEW

 

Menley et Lacey entrent dans l'ascenseur de Garden View - l'immeuble grand standing où logent une partie des professeurs de l'Unecain - chacune portant une valise.

 

LACEY : …Vous verrez, vous allez vous plaire ici. Le coin est plutôt sympathique et il y a plein de choses à voir… et surtout pas mal de beaux garçons.

 

MENLEY (en riant) : Mais dites-moi. Vous ne pensez vraiment qu'à ça !

 

LACEY : Euh… Oui. Pourquoi ? Vous voyez d'autres centres d'intérêts dans la vie ?

 

Elles arrivent devant la porte d'entrée de l'appartement de Menley. Lacey cherche dans sa poche et lui tend les clés avec un sourire.

 

LACEY : Voilà ma chère. Vous voilà arrivée à bon port. J'espère sincèrement que vous allez vous plaire ici.

 

MENLEY : Merci Lacey.

 

La porte d'entrée de l'appartement est à deux battants. Elle donne directement sur un grand salon. En face, un grand divan à coin. A gauche, une penderie. A droite, une grande télévision posée sur un meuble en chêne massif, avec une chaîne hi-fi. Plus loin dans la pièce se trouve une salle à manger avec table, chaises et un grand buffet. En face de la salle à manger se trouve le comptoir de la cuisine, puis la cuisine proprement dite, très grande et très fonctionnelle. Derrière le salon, un couloir. A gauche, deux chambres à coucher et à droite, deux salles de bains.

 

LACEY : Alors, qu'en dites-vous ?

 

MENLEY : C'est magnifique ! C'est au moins trois fois plus grand que l'appartement que j'avais à New York.

 

LACEY : Ah, mais vous n'êtes plus à New York, ma chère ! Bienvenue au pays démesuré de Garden Place et de la Californie !

 

Les deux femmes pénètrent dans le salon. La porte d'entrée est encore ouverte, et une femme d'âge mûre frappe à la porte.

 

ALICE JUDICAL : Je peux entrer ?

 

LACEY : Oui, bien sûr. Menley, je te présente Alice Judical, la directrice de l'Unecain.

 

Mlle JUDICAL : Je suis ravie de vous connaître, Menley.

 

Mlle Judical a un accent hollandais très prononcé.

 

Mlle JUDICAL : Le collège de New York m'a dit tellement de bien de vous que je n'ai pas hésité à vous engager.

 

MENLEY : Madame Judical. Je suis très honorée d'avoir été choisi afin enseigner à l'Unecain. C'est une des écoles les plus réputées du pays.

 

Mlle JUDICAL : J'ai prévu une petite réception, ce soir, dans ma suite. Une petite fête de bienvenue en quelque sorte. Vous ferez ainsi connaissance avec quelques-uns de vos nouveaux collègues.

 

MENLEY : Merci pour cette attention. Cela me touche beaucoup.

 

Mlle JUDICAL : Je compte sur vous pour 7h00. Venez aussi Lacey.

 

Bizarrement, Mlle Judical ne regarde pas Lacey lorsqu'elle lui parle. La directrice prend congé de ses deux employées.

 

MENLEY : Comment j'ai été ?

 

Lacey fait la moue. Le sourire de Menley s'efface.

 

MENLEY : J'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ?

 

LACEY : Non… enfin… N'appelles jamais ce vieux dragon Madame. Elle déteste ça. Elle veut qu'on l'appelle Mlle Judical.

 

Lacey fait une révérence pour se moquer.

 

LACEY : Bon, je dois y aller. J'habite l'appartement en face du tien. Si tu as besoin de quelque chose, n'hésite pas à me déranger. La suite de la grande prêtresse se trouve au dernier étage de l'immeuble. Nous irons ensemble si tu veux.

 

MENLEY : Oui merci. Ca m'arrangerais beaucoup de ne pas arriver seule à la réception.

 

 

 4  L'APPARTEMENT DES LAYTON

 

Nous sommes dans le salon de Beth et Frank Layton. Frank est assis sur le canapé, occupé à lire un journal, juste en face d'une télévision qui n'est pas allumée. A sa droite se trouve un escalier en colimaçon. Beth Layton descend cet escalier se plante devant son mari.

 

BETH : Mlle Judical nous invite ce soir à une réception.

 

FRANK (ne prêtant aucune attention à sa femme) : Vas-y sans moi.

 

BETH : Il s'agit d'une fête pour souhaiter la bienvenue à la nouvelle.

 

Frank baisse la feuille de son journal. Sans un mot, il se lève et monte l'escalier. Beth lui crie :

 

BETH : Il faut que tu viennes, tu m'entends. Je n'ai pas envie que tout le monde se pose des questions en me voyant arriver seule.

 

Frank s'arrête en haut de l'escalier et se retourne.

 

FRANK : Pourquoi Beth ? Pour essayer de sauver les apparences ? Très peu pour moi, merci.

 

 

 5  L'APPARTEMENT DE JILLIE PERKINS

 

Jillie Perkins est dans sa cuisine. Le téléphone, accroché au mur près du micro-onde, sonne. Jillie décroche.

 

JILLIE : Allô ?… Une soirée ? Ecoutez, je n'ai pas tellement envie de me montrer ce soir. J'avais l'intention de me louer un film et de passer une soirée tranquille…. Non… non ce n'est pas… ce n'est pas ça…. Très bien, je viendrai.

 

Contrariée, Jillie raccroche le combiné. Elle sort d'un placard une bouteille de Vodka, prend un verre et se sert une bonne dose, qu'elle boit avec avidité.

 

 

 6  LA SUITE DE MLLE JUDICAL à GARDEN VIEW

 

Une femme d'âge moyen ouvre la porte d'entrée. Menley porte un tailleur bleu et Lacey est en pantalon noir avec pull blanc.

 

LACEY : Bonjour, Flora.

 

FLORA : Mlle Calvin ! Comment allez-vous ? Mais entrez donc.

 

La suite de Mlle Judical est grande et spacieuse. Au milieu, un canapé qui fait face à une petite table. En face, une cheminée. Les escaliers sont tout de suite à gauche de l'entrée. A droite, une porte donne accès à la cuisine. Les murs sont peints dans les tons mauves. Quelques peintures contemporaines valant une fortune sont accrochées aux murs.

 

LACEY : Merci Flora. Je vous présente notre nouveau professeur d'anglais et par la même notre nouveau locataire de Garden View : Menley Weaver. Voici Flora, la perle des perles.

 

MENLEY : Bonjour.

 

FLORA : Enchantée, Mlle Weaver… Je vais prévenir Mlle Judical de votre arrivée.

 

Flora pivote sur elle-même et se dirige à petits pas vers l'escalier. Menley fronce les sourcils.

 

MENLEY : Est-ce qu'elle est… ?

 

LACEY : Aveugle, oui. Flora est en fait la fille de l'ancienne nourrice de Mlle Judical. Elles se connaissent depuis qu'elles sont gamines. A sa mort, la nourrice lui a fait promettre de prendre soin de sa fille. Et les deux femmes ne se sont plus jamais quittées. Flora est devenue en quelque sorte la gouvernante du Vieux Dragon.

 

MENLEY : Tu ne semble pas beaucoup apprécier notre directrice, on dirait !

 

LACEY : Disons que nous n'avons pas toujours la même façon de penser.

 

Mlle Judical descend les escaliers et fait son entrée dans la pièce. Elle porte une robe longue rose parsemée de perles.

 

Mlle JUDICAL : Menley… Vous êtes superbe.

 

MENLEY : Merci, mademoiselle. Je vous retourne le compliment.

 

Mlle Judical ignore totalement Lacey.

 

LACEY (en aparté) : Et vous, ma chère Lacey, vous êtes rayonnante…

 

Lacey fait une grimace. Mlle Judical précède les deux femmes qui toutes trois se dirigent vers une table, près du canapé, où sont dressés boissons et amuse-gueules.

 

Mlle JUDICAL : Vous êtes la première arrivée. Je l'ai fait exprès, bien sûr. Vous êtes l'invitée vedette de la soirée et…

 

Lacey se dirige vers la cheminée.

 

LACEY : Votre cheminée est vraiment ravissante.

 

Mlle Judical affiche un sourire crispé.

 

Mlle JUDICAL : Ne me coupez pas la parole lorsque je suis en train de parler, Lacey… Ca fait vraiment très mauvais genre… Je disais donc que j'ai prié les autres invités de venir vers 8 heures… Voulez-vous vous asseoir, ma chère enfant ? Je vais voir à la cuisine où en est le rôti.

 

Mlle Judical disparaît dans la cuisine.

 

LACEY (en aparté et prenant l'accent hollandais) : Et vous, ma chère Lacey, voulez-vous vous asseoir, ou bien préférez-vous vous jeter par la fenêtre et disparaître à tout jamais !

 

MENLEY : C'est vraiment bizarre, mais j'ai l'impression que Mlle Judical ne t'aime pas beaucoup.

 

LACEY : A franchement parler, c'est réciproque.

 

MENLEY : Elle fait comme si tu n'existais pas. Et les rares fois où elle t'adresse la parole, elle ne prend même pas la peine de te regarder.

 

LACEY : Oh, laisse tomber, c'est une vieille gâteuse !

 

On sonne à la porte. Flora descend doucement les escaliers et ouvre. Sur le palier se tient une jeune fille rousse d'environ vingt ans, qui sourit à pleine dents. Il s'agit de Nanne Bolevino. Elle porte un deux-pièces blanc crème.

 

NANNE : Bonjour Flora.

 

FLORA : Nanne, ma chérie ! Mais entre donc.

 

Nanne pénètre dans la pièce et embrasse Flora. Menley et Lacey se lèvent, tandis que Flora se rend à la cuisine.

 

LACEY : Menley, voici Nanne Bolevino, l'aide maternelle à l'Unecain. Elle adore les enfants et les enfants le lui rendent bien !

 

MENLEY : Ravie de faire votre connaissance, Nanne.

 

NANNE : Enchantée. J'avais vraiment hâte de connaître la future locataire de Garden View. J'habite l'appartement juste au-dessous du vôtre.

 

MENLEY : Et bien, si jamais je fais trop de bruit, n'hésitez pas à prendre le balai et à cogner au plafond.

 

NANNE (en riant) : Ne vous inquiétez pas pour ça.

 

Nanne se verse un coca pendant que Menley et Lacey reprennent place sur l'imposant canapé.

 

MENLEY : J'ignorais que l'Unecain avait également une section maternelle.

 

NANNE : Elle a ouvert ses portes seulement l'année dernière, lors de la restructuration de l'établissement. L'avez-vous déjà visité ?

 

MENLEY : Non, pour l'instant, je ne l'ai vu qu'en prospectus.

 

Nanne s'assoit entre Lacey et Menley.

 

NANNE : Vous allez l'adorer, croyez-moi. C'est un bâtiment splendide.

 

La porte d'entrée s'ouvre. Jillie Perkins apparaît, vêtue d'un tailleur noir. Elle se dirige vers les trois femmes en titubant légèrement.

 

JILLIE : Il paraît qu'il y a une fête ici.

 

LACEY (sur un ton ironique) : Tu sais qu'on a inventé, il y a maintenant plusieurs années, une petite boîte avec un bouton. Et lorsqu'on appuie sur ce bouton, on entend un son agréable qui ressemble à ceci… ding… dong… Chez les personnes civilisées, on appelle cela sonner à la porte afin de prévenir l'hôte que l'on est là…

 

Et justement, la sonnerie de la porte retentit.

 

LACEY (en souriant) : …Exactement comme ça, tu vois ?

 

Jillie rit à pleine voix. Elle s'approche de Lacey et lui tape sur l'épaule.

 

JILLIE : Sacrée Lacey… toujours le mot pour rire, comme je vois. C'est comme clown dans un cirque que tu aurais dû faire carrière.

 

LACEY : Franchement Jillie. Il suffit de te regarder pour savoir que le clown dans cette histoire, ce n'est pas moi.

 

Menley se racle la gorge.

 

LACEY : Ah oui. Menley, voici Jillie Perkins.

 

Tandis que Flora ouvre la porte d'entrée à trois nouveaux invités, Jillie regarde Menley en penchant la tête d'un côté, puis de l'autre.

 

JILLIE : Voici donc notre nouvelle recrue. Vous avez déjà pris votre paquetage ? Attention, revue d'incorporation ce soir. Le sergent chef Judical va vous étudier de la tête au pied. J'espère que vous avez les reins solides, ma petite…

 

Elle s'approche de Lacey.

 

JILLIE : … Il en faut pour supporter certaines choses, ici.

 

Lacey, qui fait une grimace.

 

LACEY : Tu empestes l'alcool, tu ne sais même plus ce que tu dis. Mais de ça, on a l'habitude.

 

NANNE : Vous allez arrêter vous deux ! Nous sommes ici pour fêter l'arrivée de Menley. Que va-t-elle penser de votre comportement ?

 

JILLIE (à Nanne) : Fais-moi plaisir, Mary Poppins : redescend sur terre !

 

Alors que Flora retourne à la cuisine, les nouveaux arrivants se dirigent vers les trois femmes. Il s'agit de Kelly et Stuart Farris et de Gil Chabert. Kelly regarde Menley et arbore un grand sourire.

 

KELLY : Vous devez être Menley. Je suis Kelly Farris et voici mon mari Stuart.

 

Gil se fraie un chemin entre le couple et tend la main à Menley.

 

GIL : Et moi, c'est Gil Chabert. J'enseigne le sport à l'Unecain.

 

STUART : Kelly et moi habitons l'appartement juste en dessous de cette suite. Nous aimerions beaucoup vous avoir pour dîner très prochainement.

 

MENLEY : Et bien... oui... avec plaisir.

 

Kelly passe son bras droit autour de l'épaule droite de Menley.

 

KELLY : Et maintenant, Menley, je veux tout savoir sur vous.

 

MENLEY : Très bien. Je viens de New-York, ville de mon dernier poste en date.

 

KELLY : Vous êtes originaire de là-bas ?

 

MENLEY : Non, en fait, j'ai grandi dans le Minnesota. J'ai parcouru pas mal de kilomètres : je n'ai fait pour l'instant que des remplacements.

 

NANNE : Vous voulez dire que ce poste à l'Unecain est votre première titularisation ?

 

MENLEY : Oui.

 

GIL : Vous avez une chance folle. Il est rare que l'on propose une première titularisation à l'Unecain, vous savez.

 

Jillie, un verre à la main, s'assoit sans grâce sur le canapé. Elle pousse un soupir.

 

JILLIE : La soirée risque d'être longue.

 

Lacey s'assoit à côté d'elle et sourit.

 

LACEY : Mais non voyons. Comment peux-tu dire que cette soirée sera longue pour toi ? Dans dix minutes, tu vas rouler sous la table et dans un quart d'heure, il faudra te porter pour te ramener chez toi, où tu t'endormiras pour te réveiller le lendemain matin avec une gueule de bois carabinée. Ca ira très vite, tu verras.

 

JILLIE (faisant la moue) : La ferme, Lacey !

 

LACEY : Tu sais, je plains les hommes qui vont devoir te porter jusque chez toi…

 

Lacey prend un toast dans la main et le porte à la bouche.

 

LACEY :… car tu as pris du poids ces derniers temps.

 

Jillie fait une grimace et regarde Lacey.

 

JILLIE : Lacey Calvin : puisse le toast que tu es en train d'avaler sans grâce rester coincé à jamais dans ta gorge.

 

Lacey sourit, puis fait une grimace en serrant sur sa gorge, avant d'avaler le toast. Nanne s'approche de Menley.

 

NANNE : Et c'est comme ça tout le temps !

 

Mlle Judical revient de la cuisine.

 

Mlle JUDICAL : Notre rôti est en bonne voie… ah, je vois que tout le monde est là.

 

UNE FEMME : Presque tous.

 

Les invités se retournent et Beth Layton rejoint la troupe. La jeune femme porte une jupe et une chemise noire avec une ceinture rouge et des bottes. Elle regarde Mlle Judical.

 

BETH : Excusez-moi Alice. La porte était entrouverte et je me suis permis d'entrer.

 

Mlle JUDICAL : Votre mari n'est pas avec vous ?

 

BETH : Non, il ne se sentait pas très bien ce soir.

 

Mlle JUDICAL : Rien de grave, j'espère. Je sais qu'une mauvaise grippe court dans le coin.

 

BETH : Non, juste un peu de fatigue. Vous savez qu'il revient d'un long voyage.

 

Mlle JUDICAL : Beth, je vous présente Menley.

 

Menley lui sourit. Beth lui tend la main, mais sans sourire.

 

MENLEY : Enchantée.

 

Mlle JUDICAL : Bien, je crois que tout le monde est là. Menley, faites comme chez vous. A Garden View, nous formons une grande famille, vous savez.

 

LACEY (en aparté) : Ouais, tu parles !

 

La soirée débute. Chacun y va de sa conversation, sur un fond de musique douce. Jillie s'approche de Beth en titubant.

 

JILLIE (à propos de Frank) : Fatigué, hein ?

 

BETH : Jillie, tu ne tiens plus debout.

 

JILLIE : N'y aurait-il pas de l'eau dans le gaz entre vous deux ?

 

BETH : Franchement, Jillie, ça ne te regarde pas.

 

JILLIE : Tiens, au fait. Ou est Tim ?

 

BETH : Comment le saurais-je ?

 

JILLIE : Je pensais que vous n'aviez pas de secret, l'un pour l'autre. Et que c'est la raison pour laquelle Frank est parti aussi longtemps cet été… et c'est peut-être même la raison pour laquelle il est si… fatigué ce soir !

 

BETH : Au lieu de te préoccuper des problèmes des autres…

 

Beth prend le verre vide des mains de Jillie et le pose sur la table. Elle y verse une large dose de vodka, reprend le verre et le met dans la main droite de Jillie.

 

BETH : …occupe-toi plutôt des tiens.

 

Jillie sourit, se retourne et part s'asseoir sur le canapé. Dans la pièce, Nanne discute avec Gil, Lacey avec Menley, tandis que Kelly et Stuart sont avec Mlle Judical. Beth est seule. Elle quitte la pièce pour aller dans le petit vestibule situé sous les escaliers. Gil regarde Nanne en souriant.

 

GIL : Tu es superbe ce soir.

 

NANNE : Merci, tu es gentil.

 

GIL : Comment vas-tu ?

 

NANNE : Et bien, je fais aller, comme on dit.

 

GIL : Et Jason ? Comment ça va entre vous ?

 

NANNE : Très bien.

 

Gil baisse les yeux et regarde le sol. Il secoue la tête.

 

NANNE : Gil, ne commence pas, s'il te plaît. Je sais ce que tout le monde pense de Jason à Garden View. Mais vous vous trompez tous. Jason n'est pas le genre de type que vous croyez.

 

GIL : Nanne, il se sert de toi.

 

NANNE : Gil, je t'en prie...

 

Une nouvelle fois, on sonne à la porte. Un jeune homme d'environ vingt ans, vêtu d'un jean et d'une veste jean apparaît. Il s'agit de Jason Patrick, l'ami de Nanne. Il sourit et embrasse Flora sur la joue.

 

JASON : Salut, ma puce !

 

Flora ouvre la bouche pour protester. Mais Jason passe devant elle et va au milieu de la pièce, où tout le monde le regarde. Jason lève les mains.

 

JASON : Alors, on fait une petite fête, et on oublie d'inviter le petit Jason ? Ce n'est pas très gentil, ça.

 

Nanne s'approche de lui, gênée.

 

NANNE : Jason…

 

JASON : Ne formons-nous pas une grande et belle famille, comme aime à le répéter notre charmante directrice ?

 

NANNE : Jason, je t'en prie.

 

Mlle Judical s'approche du couple.

 

Mlle JUDICAL : Monsieur Patrick. Vous n'avez effectivement pas été invité. Et il y a deux raisons à cela : la première, c'est que vous n'êtes pas le bienvenu chez moi ; et la seconde, c'est qu'il y a ici une fortune en argenterie… que je tiens à garder !

 

JASON : Ah !… là…. Miss Judical, vous m'offensez. Penser que j'en veux à votre argenterie…

 

Jason prend Nanne autour du cou.

 

JASON : Je suis ici parce que j'aime Nanne et ma place est à côté d'elle.

 

LACEY (en aparté) : C'est ça, et moi je suis la Reine d'Angleterre.

 

NANNE : Jason, on ferait peut-être mieux de partir.

 

JASON : Mlle Judical, voulez-vous gâcher la soirée à Nanne en nous renvoyant comme des malpropres ?

 

Mlle Judical regarde Nanne pendant quelques secondes.

 

Mlle JUDICAL : Je vais dire à Gloria de rajouter un couvert.

 

Elle quitte la pièce et va dans la cuisine. Nanne prend Jason à part.

 

NANNE : Mais qu'est-ce qui t'as pris de venir ici ?

 

JASON : Nanne, voyons, ma petite caille. Tu n'es pas contente de me voir ?

 

NANNE : Tu n'étais pas invité.

 

JASON : Oui, et je trouve que ce n'est pas juste. Après tout, nous vivons bien ensemble, non ?

 

Jason caresse la joue de Nanne et lui sourit. Elle baisse les yeux.


Dans le vestibule situé en dessous des escaliers, Beth décroche le combiné mural et appelle Frank.

 

FRANK : Allô !

 

BETH : Frank, je te préviens, tu as intérêt à venir immédiatement.

 

FRANK : Je t'ai dit que j'étais fatigué.

 

BETH : Je m'en fiche. Ecoute, on me pose des tas de questions, on fait des tas de sous-entendus et j'ai horreur de ça. Alors fais un effort. Prends sur toi et ramène tes fesses illico, sans quoi…

 

FRANK : Sans quoi ?

 

BETH : … viens !

 

Elle raccroche, ne laissant pas à Frank le temps de protester.

 

Nous retournons au salon avec Nanne, Gil et Jason.

 

JASON : Dis-moi ma caille, vous étiez en grande conversation tous les deux quand je suis arrivé.

 

NANNE : Gil me faisait savoir qu'il me reste encore trois jours avant la clôture des inscriptions pour la prochaine session aux cours de création littéraire.

 

JASON : Ce brave Tonton Gil. Toujours aussi prévenant, à ce que je vois.

 

Jason se tourne vers Nanne.

 

JASON : Mais dis-moi. Tu penses encore à t'inscrire à ce cours… Nous en avons déjà parlé. A mon avis, c'est du temps perdu.

 

GIL : Nanne a beaucoup de talent. Elle peut devenir un grand écrivain.

 

NANNE : Jason, je sais que j'en suis capable.

 

JASON : Ma caille, écrire un roman demande beaucoup de temps, d'énergie, et de concentration.

 

GIL : Parce que bien sûr, vous vous y connaissez en matière d'écriture !

 

JASON : Je suis moi aussi un artiste, Chabert. Peut-être pas dans le domaine de l'écriture, mais je connais les rouages du métier. C'est un métier très dur, et il faut être très fort pour arriver à ce qu'on veut.

 

Jason pose ses deux mains sur les épaules de Nanne.

 

JASON : Nanne, crois-moi. Je pense que tu fais une erreur en voulant persister à devenir écrivain. Je ne voudrais pas te voir souffrir.

 

Gil pousse un profond soupir. Il pivote et va rejoindre Lacey et Menley.

 

GIL : Je vais le tuer !

 

LACEY : Tu parle de Jason ?

 

GIL : Ce type est une ordure. Comment une jeune fille belle et intelligente comme Nanne reste avec un rigolo pareil ?

 

Lacey lui tape sur l'épaule.

 

LACEY : L'amour, mon grand… l'amour et ses mystères…

 

GIL : J'espère qu'un jour, elle se réveillera et se rendra compte que ce type ne fait rien d'autre que profiter d'elle.

 

LACEY : Et moi, j'espère que ce jour-là, il ne sera pas trop tard.

 

Menley quitte Lacey et Gil pour se restaurer à la table. Elle se sert une grande rasade de jus d'orange. Kelly vient vers elle.

 

KELLY : Alors, Menley ? Quelles sont vos impressions sur Garden View et ses habitants ?

 

Menley regarde autour d'elle. Elle voit Jillie, affalée sur le canapé, son verre à la main, puis Jason qui s'anime face à Nanne ; et enfin Lacey qui fait une grimace alors que Mlle Judical passe devant elle.

 

MENLEY : On peut dire qu'on ne s'ennuie pas une seconde ici.

 

KELLY (en riant) : Oui, vous avez raison. Il se passe pas mal de choses bizarres ici. Mais n'y prêtez pas trop attention. Vous allez vite vous y faire.

 

Kelly lève son verre en regardant Menley.

 

KELLY : Bienvenue en Californie, pays des rivalités en tous genres.

 

MENLEY : Ca ne devrait pas m'effrayer, je sais. Pourtant, je suis un peu gênée par… disons… certaines situations…

 

KELLY : Il ne faut pas, Menley. Et puis, tout le monde ne ressemble pas à Jason ou à Jillie… heureusement pour nous. Regardez-moi. Je ne me fâche avec personne. A mon avis, il faut prendre les gens comme ils sont.

 

MENLEY : Oui. Et aussi savoir garder les pieds sur terre.

 

Le sourire de Kelly disparaît.

 

KELLY : Je ne les ai pas toujours eus, les pieds sur terre, croyez-moi.

 

Kelly regarde Menley dans les yeux.

 

KELLY : Menley, je ne vous connais pas, mais pourtant, je sens que je peux avoir confiance en vous. J'ai besoin de me confier. Vous comprenez, personne ne me croit.

 

Kelly agrippe la manche du chemisier de Menley.

 

KELLY : Aidez-moi !

 

MENLEY : Vous m'intriguez, Kelly. Si je peux vous être utile…

 

KELLY : Oui, il faut les persuader… les persuader que je dis la vérité.

 

MENLEY : Persuader qui ?

 

KELLY : Mais tout le monde. Mon mari, Gil, Lacey, Beth… tous. Tout le monde me croit folle ! Je ne suis pas folle, Menley. J'ai toujours dit la vérité.

 

MENLEY : Mais enfin, la vérité sur quoi ?

 

KELLY : Je ne suis pas folle. Je sais ce que j'ai vu. Je sais ce que j'ai vécu. Oh ! Mon Dieu, quand j'y repense… c'était atroce.

 

Kelly prend Menley par le bras et l'emmène dans le coin de la cheminée. Stuart, tout en discutant avec Mlle Judical, les observe.

 

KELLY : Depuis cette histoire, je n'arrive plus à dormir normalement. Je suis sur mes gardes toute la journée. J'ai peur " qu'ils " recommencent.

 

MENLEY : Qui recommence ? Et à faire quoi ?

 

KELLY : " Ils " m'ont kidnappée ?

 

MENLEY : Vous avez été kidnappée ?

 

KELLY : Oui, il y a un peu moins de six mois maintenant.

 

MENLEY : Et la police ? A-t-elle arrêté les coupables.

 

KELLY : La police ne m'a pas cru. Et les autres non plus.

 

Stuart fronce les sourcils et se dirige vers elles.

 

KELLY : Tout le monde est contre moi dans cette histoire.

 

Stuart, maintenant près de Kelly, l'attrape par le bras.

 

STUART : Chérie. Il faut que tu parles à Mlle Judical du plan que tu as en tête pour le programme d'économie de cette saison.

 

STUART (à Menley) : Kelly est professeur d'économie et pense avoir trouvé un moyen d'intéresser un peu plus ses élèves à cette matière…. Excusez-nous.

 

Stuart entraîne Kelly vers Mlle Judical. Kelly se retourne vers Menley, qui fronce les sourcils.
De l'autre côté de la pièce, Lacey regarde Jillie se servir un autre verre.

 

LACEY : Si j'ai bien compté, c'est le cinquième.

 

Jillie se tourne vers elle, les yeux vitreux.

 

JILLIE : Tiens Lacey ! Quelle mauvaise surprise !

 

Elle pointe son doigt vers la tignasse rousse et ébouriffée de Lacey.

 

JILLIE : Superbe ta nouvelle coiffure. Tu as trouvé cette nouvelle coupe dans " Pétard Magazine " ?

 

LACEY : Ca suffit Jillie. Je crois que tu as assez bu comme ça. Je n'ai pas envie que tu bousilles la soirée de Menley.

 

JILLIE : Menley ?… Ah oui, la petite nouvelle. Oh, elle s'en remettra.

 

Lacey prend le verre des mains de Jillie. Mais Jillie le reprend avec vivacité.

 

JILLIE : Laisse ça tranquille et fiche-moi la paix, Calvin.

 

LACEY : Tu es vraiment pitoyable. Non mais regarde-toi dans une glace. Tu fais peur à voir. Tu n'es plus qu'une épave lorsque tu bois.

 

JILLIE : Parce que tu t'intéresses à moi, maintenant. Espèce de sale garce !

 

Lacey se tourne alors vers Mlle Judical, qui parle avec Gil.

 

LACEY : Combien de temps allez-vous encore fermer les yeux ?

 

Mlle Judical continue de regarder Gil.

 

Mlle JUDICAL : Encore une fois, vous m'interrompez. Il est très impoli de couper la parole de la sorte.

 

Lacey prend le bras de Mlle Judical afin de la forcer à lui faire face.

 

LACEY : Vous ne voyez donc pas que Jillie a des problèmes ? Regardez-la. Elle ne tient plus debout. Et c'est de plus en plus fréquent.

 

Mlle JUDICAL : Mlle Calvin, il s'agit de sa vie. Et je n'ai pas à m'immiscer. Pas plus que vous d'ailleurs. Tant qu'elle ne boit pas à son travail, elle peut faire ce qu'elle veut en dehors de ça. Ca ne nous regarde pas.

 

LACEY : Comment pouvez-vous être aussi insensible à ce point !

 

Mlle JUDICAL : Laissez Jillie tranquille une bonne fois pour toute. Je vous ai longuement observé toutes les deux ces derniers temps. Vous êtes constamment à couteaux tirés. Cessez une bonne fois pour toute ces enfantillages. Ne vous occupez plus d'elle et elle vous laissera tranquille.

 

LACEY : Alors celle-là, c'est la meilleure ! Vous reportez tous les torts sur moi alors que c'est elle qui a des problèmes.

 

Mlle JUDICAL : Ne soyez pas insolente, Mlle Calvin. N'oubliez pas que vous vous adressez à votre supérieure hiérarchique…

 

LACEY : Mais vous venez de le dire, nous ne sommes pas au travail, et si Jillie peut faire ce qu'elle veut en dehors de l'Unecain, moi je peux dire ce que je veux. Et je vous dis au revoir !

 

Lacey quitte la suite de la directrice en claquant la porte si fort que les convives sursautent. Mlle Judical hausse les sourcils.

 

Mlle JUDICAL : Et voilà un couvert en moins.

 

Jillie rit à gorge déployée tout en tapant sur l'épaule de Menley, qui affiche un certaine gêne devant la situation. Mlle Judical se tourne vers le couple Farris. Kelly et Stuart parlent avec agitation.

 

KELLY : Ca suffit ! J'en ai vraiment assez qu'on me prenne pour une cinglée.

 

STUART : Chérie, nous en avons déjà parlé des centaines de fois…

 

Stuart pose sa main droite sur le bras gauche de Kelly. Mais Kelly le repousse brutalement.

 

KELLY : Arrête ! Ne me touche pas.

 

MLLE JUDICAL : Stuart, s'il vous plaît, vous voulez bien raccompagner Jillie chez elle ? Je crois… qu'elle ne se sent pas très bien.

 

STUART : Bien sûr. Et si vous le permettez, nous allons prendre également congé de vous…

 

Stuart regarde Kelly, qui elle a les yeux baissés.

 

STUART : Kelly non plus ne se sent pas très bien.

 

MLLE JUDICAL : Oui, bien sûr, je comprends

 

Il se dirige vers Jillie et Menley, et prend Jillie par les épaules.

 

STUART : Excusez-nous Menley… Allez viens Jillie. Il est temps de partir.

 

JILLIE : Stuart ! ! ! Mais laisse-moi tranquille. Je commence à peine à m'amuser.

 

Jillie se tourne vers Menley.

 

JILLIE : Superbe soirée, non ?

 

Stuart emmène Jillie vers la sortie. A mi-chemin, il se tourne vers Kelly.

 

STUART : Tu viens, Kelly ?

 

Kelly regarde Menley, puis Mlle Judical, et après une hésitatoin, se tourne vers son mari. Tous trois quittent la suite.

 

MLLE JUDICAL : Menley, ma chère enfant. Je suis vraiment navrée de ce qui arrive ce soir.

 

MENLEY : Mais ce n'est pas votre faute.

 

MLLE JUDICAL : Peut-être, mais c'est " ma " soirée, et je me sens un peu responsable de tout le monde ici. Excusez-les. Ils n'agissent pas toujours comme ça, croyez-moi.

 

MENLEY : J'avoue que je ne sais pas trop quoi penser lorsque je vois tout ce qui s'est passé ce soir.

 

Beth est dans un coin de la pièce. Elle a un verre à la main et regarde l'horloge. Des tremblements trahissent son impatience.

Jason rejoint Gil.

 

JASON : Dites-moi, mon vieux. C'est vous qui avez incité Nanne à prendre ces cours ridicules ?

 

GIL : Ces cours n'ont rien de ridicule. C'est vous qui êtes ridicule.

 

JASON : Un bon conseil, mon vieux : laissez Nanne tranquille.

 

GIL : Écoute mon garçon. Si c'est une menace elle ne me fait pas peur. Et pour ta gouverne, saches que c'est Nanne qui a eu l'idée de prendre des cours de création littéraire. Je l'ai encouragé, et je continuerai à le faire. C'est clair.

 

JASON : Mais Nanne n'a certainement pas besoin de vos services.

 

GIL : Nanne est mon amie et je veux l'aider.

 

JASON : Voyons, elle n'a nullement besoin de ces stupides cours littéraires. A quoi ça peut lui servir, d'écrire ?

 

GIL : Nanne peut devenir un grand écrivain si elle travaille dur.

 

JASON : Nanne n'a pas besoin de devenir écrivain.

 

GIL : Ah ? Et d'après vous, de quoi a-t-elle besoin ?

 

JASON : Elle a besoin de moi.

 

GIL : Elle n'a pas besoin de vous. C'est vous qui avez besoin d'elle. Vous n'êtes qu'un raté, Patrick. Un acteur paumé à la manque. Vous voulez que je vous dise : sans Nanne vous seriez depuis belle lurette à la rue, en train de mendier quelques dollars aux passants. D'ailleurs, c'est là qu'est votre place !

 

Le visage de Jason se contracte. Il sert son poing et assène un coup violent du droit sur la joue gauche de Gil, qui tombe.

Menley, Nanne et Mlle Judical se retournent immédiatement. Les trois femmes courent vers Jason et Gil. Jason sert le poing et Gil est à terre. Beth les rejoint. Jason se jette sur Gil et ils roulent sur la moquette.

 

NANNE : Jason ! ! ! Gil ! ! !

 

Nanne empoigne Jason qui se relève. Gil est toujours à terre, un filet de sang coule de sa lèvre.

 

NANNE : Mais vous êtes devenus fous tous les deux ! Qu'est-ce qui vous prend ? !

 

JASON : Demande plutôt à ton ami. Il a dit des choses horribles.

 

GIL : Espèce de salaud !

 

NANNE : Bon ça suffit. Allez Jason, on s'en va.

 

JASON : Ouais ! Partons. Ca vaut mieux.

 

Jason pointe un doigt accusateur sur Gil, toujours à terre.

 

JASON : Mais je te préviens, minus. Ne t'approche plus de Nanne, sinon… je te tue.

 

NANNE : Jason, viens maintenant.

 

Avant de partir, Nanne se retourne vers les convives. Elle pleure.

 

NANNE : Je suis vraiment désolée.

 

Mlle Judical aide Gil à se relever.

 

MLLE JUDICAL : Comment ça va, Gil. Ce jeune Patrick n'y a pas été de main morte. Je vais appeler Gloria, elle va vous…

 

GIL : Non ça va aller, merci. Je ferai mieux de rentrer chez moi, maintenant.

 

Il se tourne vers Menley.

 

GIL : Bienvenue parmi nous, Menley.

 

Il est près de la porte lorsqu'on sonne.

 

BETH : C'est peut-être Frank.

 

Beth se précipite vers Gil, qui ouvre la porte. Frank fait une grimace en regardant Gil.

 

FRANK : Oh, la, mon vieux. Mais qu'est-ce qu'il t'es arrivé ?

 

GIL : Un os. Et plutôt dur à avaler.

 

Gil s'en va. Mlle Judical et Menley discutent au fond de la pièce, près de la cheminée, tandis que Beth est en face de son mari.

 

MLLE JUDICAL : Décidément, cette soirée est un véritable fiasco. Mais nous n'allons pas nous laisser abattre pour autant. Vous, moi, Beth et Frank allons passer une délicieuse et tranquille soirée, vous verrez. Le rôti est superbe et de toute façon, il ne pourra plus rien arriver de fâcheux maintenant.

 

Beth et Frank arrivent près de Menley et Mlle Judical. Beth précède Frank, et la directrice se trouve devant Menley.

 

BETH : Menley, je voudrai vous présenter Frank, mon mari.

 

Mlle Judical s'écarte et Menley et Frank se trouvent face à face. Le visage de Menley devient blême. Le visage de Frank trahit la surprise. Beth regarde tour à tour Menley et Frank.

 

FRANK : Menley !

 

MENLEY : Oh mon Dieu, ce n'est pas possible.

 

FRANK : Menley, je…

 

MENLEY : Mais c'est pas vrai. Dites-moi que c'est un cauchemar…

 

FRANK : Écoute.

 

Menley lève les mains en signe de protestation.

 

MENLEY : Oh ! Non !

 

Elle secoue la tête, puis contourne Frank et court vers la sortie. Elle ouvre la porte avec violence et disparaît sans prendre la peine de fermer la porte.

 

MLLE JUDICAL : Mais qu'est-ce qui lui prend ? On dirait qu'elle a vu un fantôme.

 

Beth regarde Frank tout en fronçant les sourcils. Frank semble en état de choc vu la pâleur de son visage.

 

BETH : Peut-être devrions-nous rentrer, nous aussi.

 

Beth prend Frank par le bras et l'entraîne vers la sortie. Tout en marchant, elle se retourne vers Mlle Judical le temps de dire :

 

BETH : Je vous appelle demain.

 

Le couple Layton parti, Mlle Judical se retrouve seule dans la pièce. La porte de la cuisine s'ouvre et Flora apparaît, ignorant tout de ce qui vient de se passer. Elle sourit.

 

FLORA : Le rôti est prêt, Alice. Gloria a fait des merveilles. Je suis sûre que tout le monde va apprécier.

 

Mlle Judical hausse les sourcils.

 

 

 7  L'APPARTEMENT DES LAYTON, LE LENDEMAIN MATIN

Frank est dans la cuisine. La pièce est grande, avec du carrelage blanc aux murs. Au milieu de la pièce, un comptoir de cuisine. D'un côté, nous avons l'évier, la table de travail et tous les appareils électroménagers. De l'autre, une table ronde avec quatre chaises. Près du comptoir, trois tabourets. Frank est assis sur celui du milieu. Il porte un peignoir de bain blanc.il boit un gorgée de son café. Beth arrive à ce moment. Frank regarde le café dans sa tasse lorsqu'il dit :

FRANK : Déjà debout ? Tu fais des progrès. D'habitude, le dimanche, tu n'émerges pas avant 10 heures.

Beth s'approche du côté évier et pose ses coudes sur le comptoir.

BETH : J'aimerais que tu m'expliques enfin ce qui se passe.

Frank regarde toujours sa tasse.

FRANK : Je ne vois pas de quoi tu veux parler.

BETH : Hier soir, tu es immédiatement parti te coucher, sans me dire un mot. Mais maintenant, tu ne vas pas y échapper.

FRANK : Hier soir, j'étais fatigué, et aujourd'hui je n'ai pas envie de parler.

BETH : Il va pourtant falloir que tu le fasses.


Beth prend la tasse des mains de Frank et la pose sur le comptoir. Pour la première fois depuis le début de la séquence, Frank regarde Beth.

BETH : Hier, je te présente la nouvelle et quand elle te voit, elle se sauve comme si elle avait vu un fantôme et toi, tu deviens blanc comme un linge. Avoue qu'il y a de quoi se poser des questions, tu ne crois pas ?

Frank se lève, prend la tasse et va s'asseoir sur une chaise, près de la table ronde.

BETH : Tu la connais, c'est ça ?

FRANK : Fiche-moi la paix, Beth.


Beth contourne le comptoir et va se planter devant Frank pendant qu'elle dit ceci :

BETH : Fiche-moi la paix, fiche-moi la paix… C'est tout ce que tu sais dire en ce moment. Depuis que tu es revenu de ton voyage en Europe, tu n'es plus le même. Tu ne m'adresses plus la parole, et j'ai l'impression d'être une étrangère pour toi. Mais qu'est-ce qui t'arrive ?

FRANK : Tu le sais très bien.


BETH : Oh, arrête, je t'en prie. Et puis, après tout, je m'en fiche. Tu peux bien faire ce que tu veux avec cette Menley, c'est ton problème.

FRANK : Enfin des paroles sensées venant de ta bouche. C'est tellement rare qu'il faudrait les faire graver sur pierre blanche.

BETH : Tu es vraiment le dernier des idiots, Frank Layton.


Beth se dirige vers le petit salon.

FRANK : Beth ?

Beth s'arrête et se retourne.

FRANK : Je veux divorcer.
 


 8  L'APPARTEMENT DE JILLIE

 

Jillie est couchée sur le canapé en cuir marron, près d'une bouteille de vodka vide. Quelqu'un frappe à la porte. Jillie fait un petit sursaut, et ouvre à moitié les yeux, avant de les refermer. La personne derrière la porte insiste. Jillie émet un petit grognement. Elle se lève très lentement. Assise sur le canapé, elle porte la main à sa tête, en faisant une grimace. Elle a la gueule de bois. Elle n'est pas maquillée et ses cheveux sont ébouriffés. Elle quitte lentement le canapé. Une fois debout, elle se dirige en trébuchant vers la porte d'entrée, la main toujours sur son front. Elle ouvre la porte et voit Lacey, qui sourit. Elle porte un bonnet de laine multicolore et un sweat-shirt assorti.

LACEY : Salut, Jillie. Quel temps splendide, tu ne trouve pas…

Elle regarde derrière Jillie, avant de reporter son regard sur elle ...

… mais tu ne peux pas le savoir puisque tes volets sont encore fermés.

JILLIE : Lacey ! Mais qu'est-ce que tu fiches ici ?

Lacey entre dans la pièce et lui montre un sac de papier kraft.

LACEY : Je suis venu t'apporter des beignets. Qu'est-ce que tu en dis ? J'ai remarqué hier que tu n'avais rien avalé… oui, enfin, rien d'autre que du liquide… C'est pourquoi j'ai pensé qu'il te fallait quelque chose de plus consistant ce matin. Et quoi de plus consistant que de bons beignets bien gras.

Lacey approche le sac plus près de Jillie. Cette dernière se détourne, avec une grimace de dégoût.

JILLIE : Vas au diable, Calvin !


LACEY : Oh la, qu'il fait sombre ici…

Lacey se dirige vers la fenêtre, à droite et ouvre le volet. Jillie grimace à la vue de la lumière ...

… il ne faut surtout pas se priver d'un aussi beau soleil. Et pour égayer encore plus cette journée, que dirais-tu ...

Elle se dirige vers la chaîne hi-fi et allume le poste ...

… d'un peu de musique rafraîchissante.

Jillie grimace une nouvelle fois et porte les mains à ses oreilles avant de les remettre sur son front… puis à nouveau sur ses oreilles.

JILLIE : Mais bon sang, qu'est-ce que tu viens faire ici à la fin ?

LACEY : Je suis simplement venue prendre des nouvelles de ta gueule de bois. Je n'ai jamais fait l'expérience de ce genre de chose. Mais dis-moi, est-ce que ça fait vraiment aussi mal à la tête qu'on le prétend ?

JILLIE : Pas assez mal pour m'empêcher de te flanquer la raclée de ta vie si tu ne fiche pas le camp immédiatement !

LACEY : Très bien, très bien… je m'en vais…

Lacey reprend le sac qu'elle avait laissé au départ sur la petite table, à côté de la bouteille vide, et le montre à nouveau à Jillie, en prenant soin de le mettre assez prêt d'elle pour qu'elle puisse sentir l'odeur ...

… je te les laisse ?

Jillie prend le sac des mains de Lacey et le jette à terre. Lacey se dirige alors vers la porte d'entrée. Une fois sur le pas de la porte, elle se retourne.

LACEY : Tu sais, Jillie. A voir ta tête de déterrée, ça doit vraiment être douloureux, une gueule de bois.

Lacey a un sourire narquois. La porte se referme sur elle.
 


 9  L'APPARTEMENT DE NANNE

 

Nanne est dans le salon. Elle regarde par la fenêtre qui se trouve à droite de l'entrée principale de l'appartement, l'air pensif. Elle tient une tasse de café dans la main. En face de l'entrée principale se trouve un escalier. Jason descend. Il vient vers Nanne et l'embrasse, mais Nanne se tourne pour éviter son baiser.

JASON : Écoute, ma caille, je t'ai déjà dit hier soir que j'étais désolé.

NANNE : Je n'arrive toujours pas à comprendre ce qui a pu se passer hier soir. Et qu'est-ce que cette pauvre Menley a dû penser de nous ? Quel beau gâchis !


Jason pose ses deux mains sur les épaules de Nanne.

JASON : Il ne faut surtout pas m'en vouloir. C'est ma faute, Nanne. J'aurais dû me contrôler.

NANNE : Mais qu'est-ce qui s'est passé pour que tu en arrives à frapper Gil de la sorte ?

JASON : Gil m'a dit des choses qui ne m'ont pas plu, c'est tout.

NANNE : Jason, voyons. On ne décroche pas un droit à quelqu'un parce qu'il a dit certaines choses.

JASON : Mais tu ne sais pas ce qu'il m'a dit.

NANNE : Non, mais j'aimerai bien le savoir.

JASON : Il ne vaut mieux pas, ma chérie.

NANNE : Mais je veux savoir. Pour que tu en sois arrivé à le frapper, ça devait être quelque chose de très important.

JASON : Oublies ça, tu veux.

NANNE : Je n'en ai pas l'intention…. Jason !

JASON : Très bien, puisque tu insistes, il a dit des choses sur toi qui ne m'ont pas plu.

NANNE : Quelles choses ?

JASON : Non, écoute, Nanne, je ne veux pas…

NANNE : Jason, dis-moi une bonne fois pour toutes ce qu'il a dit.

JASON : Il a dit qu'il n'a qu'une seule idée en tête : te mettre dans son lit.

NANNE : Quoi !


JASON : Il m'a dit que tu n'étais pas vraiment douée pour l'écriture ; que lorsque tu iras à ces cours de création littéraire, tu le comprendras et qu'alors il te faudra une épaule pour pleurer ; et il espère que ce sera la sienne.

Nanne baisse les yeux.

NANNE : Je n'arrive pas à y croire.

JASON : C'est la vérité, Nanne. Il n'attend que ça. Il veut coucher avec toi.

NANNE : Arrête, Jason, par pitié !

JASON : Je suis désolé, ma caille… mais c'est toi qui a voulu savoir. Je ne voulais pas te faire souffrir… Je t'aime de trop… et je ne veux pas te perdre à cause de ce Casanova de pacotille. La meilleure chose que tu puisses faire et d'éviter ce type. Laisse-le tomber.

NANNE : Je n'arrive pas à croire que Gil t'ait dit tout ça.

Jason prend Nanne dans ses bras.

JASON : Ma pauvre petite caille… Fais-moi confiance. Ne t'approches plus de Gil. Ce type risque de te faire beaucoup de mal.
Il lève le menton de Nanne à l'aide de son index droit afin qu'elle le regarde dans les yeux.

JASON : Tu me fais confiance, n'est-ce pas ?

Nanne pleure.

NANNE : Je croyais qu'il était mon ami. Je pensais qu'il voulait m'aider et lui…

Jason la prend à nouveau dans ses bras. Il retire son étreinte et essuie les larmes de Nanne avec sa main droite.

JASON : Eh, on ne va pas se laisser abattre comme ça. On est dimanche et on a toute la journée pour nous. On oublie tout ça tu veux. Qu'est-ce que tu penses d'une petite ballade à Great Garden ?

Nanne hoche la tête avec un faible sourire.
 


 10  GREAT GARDEN

 

Menley fait un jogging. Derrière elle apparaît Stuart. Il accélère pour arriver juste à côté d'elle. Menley tourne légèrement la tête pour le voir, puis regarde à nouveau droit devant elle en continuant de courir.

STUART : Salut.

MENLEY : Salut.


Stuart est hors d'haleine. Il transpire beaucoup et chaque enjambée supplémentaire apparaît comme un gros effort.

STUART : Comment allez-vous ce matin ?

MENLEY : Mieux qu'hier soir, si vous voulez savoir.

STUART : C'est vraiment navrant de voir ce qui s'est passé. Je suis vraiment désolé pour hier soir.

Ils courent toujours.

MENLEY : C'est vraiment bizarre, mais tout le monde semble désolé de ce qui s'est passé. Pourtant ça s'est passé. J'ai l'impression que si vous étiez tous réellement désolés, rien de tout cela ne se serait arrivé.

STUART : Vous avez peut-être raison. On doit laver son linge sale en famille. On a tous pas mal de problèmes en ce moment. Demain c'est la rentrée scolaire et tout le monde est un peu sous pression.

MENLEY : Moi aussi, j'ai des problèmes. Je ne vais pas pour autant les projeter à la figure du premier venu, comme vous l'avez tous fait hier.

STUART : On pourrait peut-être faire une pause, qu'en dites-vous ?


Menley s'arrête, imité par Stuart. Tous deux s'assoient sur un banc de bois blanc. Menley s'éponge le front avec la serviette qu'elle a autour du cou tandis que Stuart s'efforce de retrouver son souffle.

STUART : Vous semblez en colère contre nous.

MENLEY : J'ai grandi dans le Minnesota. Là-bas, j'ai acquis certaines valeurs qui ne semblent pas avoir franchi les collines de Californie. Je suis peut-être une petite paysanne qui a grandit dans un coin perdu, mais jamais chez moi on ne se serait permis de rouler sous une table, de raconter n'importe quoi ou bien encore de se battre au cours d'une soirée. Charmante mentalité !

STUART : Oui, j'ai appris ce qui s'est passé entre Gil et le petit Patrick après mon départ. Vraiment désolé, Menley.

MENLEY : Ca, vous l'avez déjà dit !


STUART : J'ai appris que vous aussi, avez quitté précipitamment la suite d'Alice.

MENLEY : Je vois que les nouvelles vont vite.

STUART : Je suis passé voir Mlle Judical ce matin. Elle m'a tout raconté. Pourquoi vous êtes-vous sauvée ?

MENLEY : C'est à mon tour d'être désolée, Stuart, mais cela ne vous regarde pas.

STUART : J'essayais simplement de vous aider. Vous avez peut-être besoin d'en parler.

MENLEY : Je n'ai nullement envie d'en parler.


STUART : Très bien. Je voulais également m'excuser pour ma femme. Hier, elle a été vraiment grossière en s'accrochant à vous de la sorte, avec cette ridicule histoire d'enlèvement. Je suis vraiment désolé.

Menley se lève.

MENLEY : Ecoutez Stuart. Si j'entends encore quelqu'un à Garden View me dire qu'il est désolé… je ne répond plus de mes actes.

Elle laisse Stuart sur le banc pour retourner sur la piste courir.
 


 11  L'APPARTEMENT DE MENLEY

 

La pièce est remplie de cartons d'emballage. Menley est assise par terre. Sur un des cartons se trouve un téléphone. Elle prend le combiné et compose un numéro.

MENLEY (d'une voix triste et cassante) : Maman ?… Ca va très bien. Je suis arrivée hier et je commence demain… Non, ça va… Ca va, je t'assure. Je voulais juste entendre une voix familière, c'est tout… Oui, tout le monde est très gentil avec moi. Les habitants de Garden View sont vraiment formidables, et Garden Place est une ville magnifique, tu sais. Il faut que tu vois ça. Le Great Garden est un endroit vraiment merveilleux. J'espère que toi et Papa pourraient bientôt vous libérer pour venir me rendre visite…

Menley ferme les yeux

… Non, bien sûr je comprends. Papa ne peut laisser en plan son club… D'accord, sans doute à Noël alors… Oui… oui… Moi aussi je t'embrasse Maman. Et embrasse Papa pour moi tu veux. Au revoir.

Elle raccroche le combiné. Elle pense à nouveau à l'été dernier. Un été formidable qu'elle a vécu avec Frank. Seule dans son appartement, elle se met à pleurer.
 


 12  GREAT GARDEN

 

Jason et Nanne sont ensemble, main dans la main. Jason montre à Nanne une biche qui court en liberté. Nanne a un sourire émerveillé. Ensuite, ils mangent une barbe à papa. Jason s'amuse à faire semblant de ne pas savoir la manger et Nanne rit. Plus tard, Jason est derrière un mime, au milieu d'un jardin. Il se met derrière lui et l'imite, ce qui fait rire Nanne. Puis on voit Nanne et Jason sur des chevaux de bois et sur des montagnes russes. Jason ouvre grand les yeux et avec ses mains, cachent ceux de Nanne. Enfin, on les voit qui marchent main dans la main sur un chemin. Autour d'eux, des arbres fleuris.

NANNE : J'ai passé une journée merveilleuse, tu sais.

Jason regarde sa montre, puis scrute les alentours.

JASON : Moi aussi, ma caille.

NANNE : On devrait faire ça plus souvent, tu ne trouve pas ?

JASON : Mmmm…


Jason regarde de nouveau sa montre. Nanne tourne la tête vers lui. Elle sourit.

NANNE : Un dollar pour tes pensées.

JASON : Oui.


Nanne fronce les sourcils.

NANNE : Jason ! On dirait que tu es à mille lieux d'ici en ce moment. A quoi penses-tu ?

JASON : Hein, quoi ?… Oh, excuse-moi ma caille. Qu'est-ce que tu disais ?

Nanne hausse les épaules.

NANNE : Non, rien. Ce n'est pas important.

Jason continue à regarder autour de lui, comme s'il s'attendait à voir surgir quelqu'un. Un homme corpulent marche sur l'allée parallèle. Il est habillé d'un pantalon à petits carreaux et d'une veste marron des plus mauvais effets.

JASON : Tu m'excuses un instant, ma caille. Je reviens tout de suite.

NANNE : Jason ?


Jason arrive près de l'homme.

JASON : Excusez-moi. M. Trench ?

TRENCH : Oui, que me voulez-vous ?

JASON : M. Trench, je suis désolé de vous importuner de la sorte. Un ami m'a dit que je pouvais vous trouver ici.

TRENCH : Ecoutez, jeune homme. Je viens à Great Garden dans l'unique but de me détendre. Vous m'importunez.

Trench reprend sa marche. Jason le suit.

JASON : M. Trench, je vous en prie, c'est important.

Trench regarde sa montre. Il s'arrête, imité par Jason.

TRENCH : Je vous donne trente secondes. Pas une de plus.

JASON : Parfait. Je m'appelle Jason Patrick, Monsieur. J'ai entendu parler qu'une nouvelle production Spelloni est en chantier…

TRENCH : Oh non, pas ça ! Encore un petit acteur à la manque… Pour une audition, faites donc comme tout le monde, prenez un rendez-vous avec ma secrétaire.

JASON : Non, M. Trench, vous n'y êtes pas. Je n'ai pas posé ma candidature à temps pour l'audition. Un de mes amis m'a prêté un exemplaire du scénario…M. Trench, le rôle de Dan McKay est pour moi.

TRENCH : Vraiment ?


JASON : Oui, je vous assure.

TRENCH : Mais qu'est-ce que vous voulez au juste ?

JASON : Juste une chance de pouvoir passer l'audition. Je vous en prie Monsieur, accordez-moi cette faveur. Vous ne le regretterez pas. Ce rôle est du sur mesure pour moi. Je le sais, je le sens.

TRENCH : Mon pauvre ami, si vous saviez le nombre de jeunes importunistes de votre espèce qui me disent être fait pour le rôle de leur vie… Les trente secondes sont largement passées. Maintenant, excusez-moi, mais j'ai autre chose à faire qu'à écouter vos histoires.

Nanne les rejoint. Elle regarde Trench, puis Jason.

NANNE : Jason ?

Trench regarde Nanne avec intérêt. Il sourit.

NANNE : Jason. Que se passe-t-il ?

TRENCH : Et bien, vous ne me présentez pas ?

JASON : Si, bien sûr. M. Trench, voici mon amie, Nanne.

TRENCH : Très bien, jeune homme. Passez donc me voir ce soir vers 6 heures. Je pourrais peut-être faire quelque chose pour vous.

Jason sourit.

JASON : Merci, Monsieur. Merci beaucoup.

Trench s'éloigne. Jason regarde Nanne avec un grand sourire, puis la prend dans ses bras et la fait tourner.

JASON : Ah ! C'est formidable.

NANNE : Jason ! Si tu m'explique ce qui se passe.

JASON : Ce type est le directeur de casting d'une super agence. La meilleure d'Hollywood. Elle organise justement une audition pour le nouveau film de Spelloni. Tu sais : " L'appel de Ricky Forbes " ? Je t'en ai parlé la dernière fois. Je t'avais dit que je m'étais inscrit trop tard pour l'audition. Et bien, Trench vient de me donner une nouvelle chance. C'est pas génial, ça ?

NANNE : C'est formidable.

JASON : Tu sais, ce rôle est vraiment fait pour moi, Nanne.

NANNE : Mais dis-moi, comment se fait-il qu'il t'ait donné rendez-vous ce soir ?

JASON : Pourquoi pas ce soir ?

NANNE : Ben, nous sommes dimanche.

JASON : Tu sais, Nanne. Dans ce métier, il n'y a ni dimanches, ni jours fériés.

NANNE : En tout cas, c'est fantastique pour toi, Jason. C'est une chance pas croyable que tu sois tombé sur ce type ici à Great Garden.

Jason sourit.

JASON : Oui, une chance pas croyable...
 


 13  L'APPARTEMENT DE MENLEY, LE SOIR

 

Menley est occupée à défaire ses cartons. Elle déballe des bibelots qu'elle pose dans son buffet, lorsqu'on sonne à la porte. Menley soupire. Elle pose le bibelot qu'elle a dans la main sur la table et se dirige vers la porte d'entrée, qu'elle ouvre. Un homme d'une trentaine d'année, cheveux bruns, sweat-shirt clair et pantalon noir, lui sourit. C'estTim O'Connell.

TIM : Menley, je suppose ?

MENLEY : Oui, c'est moi.

TIM : Bonjour, je suis Tim O'Connell, professeur de Mathématiques à l'Unecain. J'habite l'appartement en face de celui de Nanne Bolevino.

MENLEY : Ah oui ! Bonjour. Lacey m'a parlé de vous.

TIM : En mal, je présume.

MENLEY (voix hésitante) : Voulez-vous entrer quelques instants ?

TIM : Oh ! Non, surtout pas. Je ne vais pas vous déranger bien longtemps. D'ailleurs j'ai encore pas mal de choses à faire. La première est de déballer mes affaires. Je reviens tout juste d'un voyage à Dublin.

MENLEY : Ah oui, Lacey m'a dit que vous êtes d'origine irlandaise.

TIM : Oui. Toute ma famille est encore là-bas. Je m'y rends très souvent. Difficile de couper les ponts avec sa famille et ses racines.

Menley sourit.

MENLEY : Oui, je vous comprends.

TIM : Je vais vous laisser maintenant. J'étais simplement venu vous souhaiter la bienvenue parmi nous. On se revoit demain à l'Unecain pour le grand jour ?

MENLEY : Avec plaisir.

 

 

 14  L'APPARTEMENT DES LAYTON

 

Beth est dans la salle, en train de placer les couverts sur la table. Frank entre. Il est vêtu d'un survêtement et trempé de sueur. Il attrape une poire, posée dans un panier sur la table de la salle à manger, la frotte contre lui et croque un morceau.

 

BETH : C'est malin, ça. Alors que le dîner va être servi. Je nous ai préparés un bœuf carottes dont tu me diras des nouvelles.

 

Frank renifle et fait la grimace comme s'il sentait quelque chose de mauvais.

 

FRANK : Si c'est le bœuf carottes qui sent comme ça, appelle tout de suite les pompiers, puis un traiteur.

 

BETH : Ah, ah… très drôle.

 

FRANK : Tiens, au fait. Devine qui j'ai croisé dans l'escalier à l'instant ?

 

BETH : Qui donc ?

 

FRANK : Tim O'Connell. Ce brave Timmy est de retour.

 

Beth s'arrête un instant… puis continue a s'occuper de la table.

 

BETH : Vraiment ?

 

FRANK : Vraiment ! Je suis étonné que tu ne sois pas au courant. Toi et Tim avez tellement de choses en commun.

 

BETH : Frank, ne commence pas.


FRANK : Combien de temps allez-vous pouvoir attendre avant de vous jeter l'un et l'autre dans un lit ? Après tout, ça fait presque deux semaines qu'il est parti.

 

Beth lâche un couteau contre une assiette, dans un bruit fracassant.

 

BETH : Frank. Pour la dernière fois, je te dis qu'il n'y a rien entre Tim et moi !

 

FRANK : Ca, c'est une couleuvre aussi dure à avaler que le bœuf qui nous attend dans la cuisine !
 


 15  L'APPARTEMENT DE NANNE

 

Jason entre dans l'appartement. Il pousse un soupir et jette ses clés sur la table. Puis il s'affale sur le canapé. A l'aide de la télécommande, il allume le poste de télévision. Nanne descend les escaliers et le rejoint.

NANNE : Jason, tu es là ? Je ne t'ai pas entendu entrer.

JASON : Bonjour, ma caille d'amour.

NANNE : Alors, Jason. Dis-moi. Comment s'est passée l'audition ?

JASON : Ben, tu sais, ce n'était pas encore l'audition. Juste un entretien préliminaire avec Trench.

NANNE : Et alors ?

JASON : Alors il est prêt à me donner ma chance et à me faire passer l'audition.

NANNE : Mais c'est formidable alors….

Nanne lui saute au cou et l'embrasse mais on sent que Jason n'est pas à l'aise. Nanne poursuit :

…J'ai vraiment très faim. Qu'est-ce que tu dirais d'une bonne pizza devant un bon vieux film ? Il repasse " Le pont de la rivière Kwaï " sur le câble.

JASON : Nanne, attends. Je ne t'ai pas tout dit.

NANNE : Ah bon ?

JASON : Oui. Si je veux passer l'audition, Trench veut une contrepartie.

NANNE : Quoi ? De l'argent ?

JASON : Non, pas d'argent.

NANNE : Et bien quoi, alors ? Parle.

JASON : Nanne, je ne t'aurais jamais demandé ça si ce n'était pas très important pour moi.

NANNE : Jason, je ne comprends pas.

JASON : Ecoute, ma caille. Trench voudrait sortir avec toi.

NANNE : Quoi ?


JASON : Nanne, il faut que tu comprennes à quel point je tiens à ce rôle. C'est un rôle qui va changer notre vie à tous les deux, crois-moi. Dans quelques mois, je serai en haut de l'affiche avec le film le plus prestigieux de l'année et qui sera à coup sûr numéro un au box-office.

NANNE : Tu me demande de sortir avec ce type ? Avec cet… cet immonde bonhomme !

JASON : Si je décroche ce rôle, c'est le début d'une grande carrière pour moi.

NANNE : Je n'arrive pas à croire que tu me demande de faire une chose pareille.

JASON : Ecoute, je ne te demande pas de coucher avec lui.

NANNE : Encore heureux !

JASON : Mais simplement te montrer… gentille avec lui. Le flatter… enfin, ce genre du truc, tu vois ?

NANNE : Tout ce que je vois, c'est que tu veux encore une fois te servir de moi pour arriver à tes fins. Jason, j'ai fait déjà beaucoup pour toi. Je t'ai aidé dans le passé, je t'ai donné tout ce que j'avais pour que tu puisses réussir et avoir les meilleures chances possibles dans ce métier. Mais là, non ! J'arrête les frais.


JASON : Je t'en prie, Nanne, juste un dîner avec lui, c'est tout.

NANNE : Je connais ce genre d'individu. Il ne s'arrêtera pas avec un simple dîner.

JASON : Nanne, comprends-moi bien. Je ne veux surtout pas qu'il te touche… mais j'ai besoin de ce job. Comme jamais je n'ai eu besoin de quelque chose !

NANNE : Oh, je t'en prie. Epargne-moi ce genre de discours, tu veux. Ca ne prend plus avec moi.

Nanne se dirige vers l'escalier, mais Jason court vers elle et la rattrape. Il lui prend le bras d'une main ferme. Nanne se retourne brusquement.

JASON : Nanne, il faut que tu acceptes. Tu ressasses sans cesse tout ce que tu as fait pour moi. Mais tu oublies un peu vite que tu as une grosse dette envers moi. C'est moi qui t'ai sorti de ton trou. Sans moi, tu ne serais sûrement pas ici à te faire dorer la pilule. Je vais te dire : sans moi, tu serais caissière dans un supermarché minable des bas quartiers, et pas aide maternelle dans une des écoles les plus huppées de ce pays. Je t'ai tout apporté sur un plateau d'argent. C'est à toi maintenant de m'aider. Si je décroche ce rôle, tu as ma parole que je te laisserai tranquille jusqu'à la fin de ta vie. En attendant, je compte sur toi pour me l'obtenir.

Nanne essaie de dégager son bras de l'étreinte de Jason.

NANNE : Jason, tu me fais mal !

Jason lâche le bras de Nanne. Cette dernière monte les escaliers en courant.

JASON : Nanne !… NANNE ! ! !

 

 

 16  LA COUR DE L'UNECAIN HIGH SCHOOL, LE LENDEMAIN MATIN

 

L'Unecain High School de Garden Place est une grande bâtisse, à l'architecture très moderne. Au-dessus de la grande porte d'entrée se trouve une banderole où défile un message électronique. Le message est : " L'équipe de l'Unecain High School Garden Place souhaite la bienvenue à ses élèves pour la nouvelle session ". Les élèves se bousculent vers l'entrée principale. La plupart affichent un sourire. Rires, conversations animées, embrassades de retrouvailles : c'est la rentrée scolaire.

 

 

 17  L'UNECAIN HIGH SCHOOL, A L'INTERIEUR

 

Lacey et Menley sont devant une porte ou il est inscrit " Menley Weaver - professeur d'Anglais ". Lacey l'ouvre et elles pénètrent à l'intérieur d'une grande pièce meublée avec goût. Un bureau, deux fauteuils qui lui font face, de très grandes armoires sur la droite, et sur la gauche un buffet et un bar avec boisson et nourriture. Menley regarde tout autour d'elle, admirative.

MENLEY : Je n'arrive pas à y croire. C'est fantastique. C'est vraiment la première fois que je vois une école où chaque professeur possède son propre bureau. Et il est vraiment somptueux.

LACEY : Mais c'est que nous sommes à l'Unecain High School Garden Place ma chère, l'une des écoles les plus réputées, si ce n'est la plus réputée, du pays. Fini la rigolade !

MENLEY : Ouah, je suis impressionnée. Je n'arrive pas à y croire. Pince-moi

Lacey pince Menley au bras.

MENLEY : Aïe, mais qu'est-ce qui te prends ?

LACEY : Tu m'as demandé de te pincer, non ?Allez, détends-toi un peu. Je sais qu'un premier jour à l'Unecain, c'est difficile. Tout le monde est passé par-là. Ne t'inquiète pas. Tout va bien se passer.

MENLEY : J'aimerai en être aussi sûre.

Lacey prend Menley par l'épaule.

LACEY : Alors, chaque matin, Mlle Judical organise un briefing rapide. Une fois par semaine, le vendredi à 5 heures pour le compte rendu de la semaine. Aujourd'hui, c'est une journée que notre chère directrice affectionne et qu'elle appelle " la journée d'adaptation ". On ne délivrera pas de cours. Il s'agira simplement d'apprivoiser les nouveaux cancres, bref, de passer au crible tous nos charmants élèves et de faire mieux leur connaissance. Et cet après-midi, elle organise une grande réunion exceptionnelle à la salle G28. Le vieux dragon nous donnera alors ses instructions sur le programme de l'année et nous, on devra lui dire comment s'est passée la journée d'adaptation et lui dire si, déjà, on arrive à détecter les " cas difficiles ". C'est le même baratin chaque année.

MENLEY : Les cas difficiles ?

LACEY : Il faut que tu comprennes bien une chose Menley : ici, à l'Unecain, on n'accepte pas les échecs. Pour rester au top niveau, il faut une réussite totale dans les examens. Les cas difficiles, ce sont les élèves qui n'arrivent pas à suivre, ou qui ont d'autres problèmes qui peuvent être un frein à leurs études. Le professeur de l'Unecain doit pouvoir détecter cela rapidement et remédier à la situation. Ici, si l'élève n'a pas une bonne note, c'est le professeur qui doit s'expliquer, pas l'étudiant. Tous les matins, le briefing sert à exposer ce que l'on compte faire dans la journée, et à la réunion de la fin de semaine, il faut parler des fameux " cas difficiles ".

MENLEY : Quelle organisation ! Je suis impressionnée.

LACEY : Tu t'y feras vite, tu verras. Je te laisse un instant, il faut que j'aille faire un tour là où personne ne peux aller à ma place…

Elle fait un clin d'œil à Menley.

… je reviens tout de suite.

Menley sourit.

MENLEY : Prends ton temps !

Lacey quitte le bureau sans fermer la porte. Menley, seule dans la pièce, se dirige vers le grand bureau. Elle s'assoit sur le fauteuil en cuir, le fait tourner en riant, puis se lève. Elle va vers les armoires, effleure les tiroirs. Puis elle se dirige vers la porte de sortie. Elle regarde le couloir, à droite, puis à gauche et enfin elle regarde devant elle. Son sourire s'efface voyant la porte en face d'elle, où il est inscrit : " Frank Layton : professeur de langue ". Justement, cette porte s'ouvre. Frank baisse les yeux car il lit un papier, puis il lève la tête et aperçoit Menley.

FRANK : Menley, je…

Menley lève la main de façon à faire savoir à Frank qu'elle ne veut pas lui parler.

MENLEY : Non, ne dis rien.

FRANK : Mais il faut que tu saches…

MENLEY : Frank, je ne veux rien à voir à faire avec toi. Je ne veux même pas te parler. Tu m'as trahi.

Menley rentre dans son bureau et claque la porte. Frank reste seul dans le couloir.
 


 18  KELLY ET NANNE A L'UNECAIN

 

Kelly marche dans un couloir vide. Elle s'arrête devant la porte où il est inscrit : " Kelly Farris : professeur de mathématiques ". Elle prend une clé dans son sac et l'introduit dans la serrure. On entend alors un faible gémissement.
Kelly lève la tête et se retourne. Nanne est dans son bureau. La porte est ouverte. Dans la main, elle tient une photo de Jason. Kelly frappe un petit coup à la porte du bureau et entre.

KELLY : Nanne ?

Nanne relève la tête brusquement et détourne les yeux. Elle essuie rapidement ses larmes à l'aide de la paume de sa main.

NANNE : Oh, salut Kelly. Je ne t'avais pas entendu entrer.

KELLY : Est-ce que tout va bien ?

NANNE (d'une voix cassante) : Oui, ça va.

Kelly prend le menton de Nanne avec sa main, et lui fait tourner la tête de façon à voir son visage.

KELLY : A en juger par ta tête, on ne dirait pas.

NANNE : Je t'assure Kelly, ce n'est pas important.

KELLY : C'est Jason ?

Nanne éclate en sanglot.

KELLY : Nanne, raconte moi ce qui ne va pas.

NANNE : Ce n'est rien.

KELLY : Non, ce n'est pas rien. Je vois bien qu'il se passe quelque chose.

NANNE : Jason est un type bien, tu sais.

KELLY : Pourquoi me dis-tu ça ?

NANNE : Je sais que personne ne l'aime à Garden View. Mais il peut être vraiment merveilleux quand il veut…Hier, nous avons passé l'après-midi à Great Garden. C'était vraiment formidable. Jason est parfois un peu possessif, mais il faut le comprendre : il veut réussir et il n'y a rien de mal à ça. Il ferait n'importe quoi pour être un grand acteur… Oui… n'importe quoi. Il cache en fait une grande sensibilité. Et puis, je lui dois beaucoup. Ma mère était alcoolique et mon père un voyou de bas étage. C'est grâce à lui si j'ai pu m'échapper de l'enfer qu'on me faisait vivre à la maison. J'avais seize ans lorsque je me suis enfuie de chez mes parents. Sans Jason, je me serai retrouvée à la rue, sans rien. Au lieu de ça, il a trouvé un job et un appartement. J'ai passé alors les instants les plus heureux de ma vie. Je me rappelle tous nos fous rires, ces pizzas qu'on ingurgitaient en regardant de vieux films sur un poste de télévision en noir et blanc qu'on avait trouvé dans une décharge. J'étais vraiment heureuse. Puis tout a changé quand Jason a perdu son travail. J'ai alors rencontré Mlle Judical et la situation a été inversée. C'est moi maintenant qui l'aide. Je lui dois bien ça, non ?

 


 19  BUREAU DE MLLE JUDICAL, A L'UNECAIN

 

Mlle Judical passe la porte où il est inscrit : " Secrétariat directorial " La porte s'ouvre sur une grande pièce, spacieuse et lumineuse. Au sol, de la moquette verte ; aux murs du papier peint crème crépis ; les meubles sont modernes. Au fond de la pièce se trouve un grand comptoir. Derrière ce comptoir : un bureau spacieux. Sur le mur : le logo de l'Unecain High School en grand. A côté du comptoir : une grande porte à deux battants. Derrière le bureau se trouve une jeune femme d'environ 25 ans. Il s'agit d'Ursula Fortner, la secrétaire de Mlle Judical. Elle est vêtue d'une chemise rouge très voyante, porte des lunettes et des couettes. Rouge à lèvres abondant, elle fait la moue tout en mâchant un chewing-gum. Elle lève la tête, puis se lèvre brusquement.

URSULA : Oh, bonjour, Mademoiselle. Comment allez-vous ? Avez-vous passée de bonnes vacances ?

Mlle Judical s'approche du comptoir et prend ses messages.

MLLE JUDICAL : Très bien. Appelez Cargon. La livraison des fournitures n'est pas complète. Demandez ensuite à Tristan de s'occuper de la facture de Marcias Entreprises. Voyez aussi si vous pouvez joindre Solaar Bumb pour un devis sur les feuilles d'examens. Je sais, les premiers n'auront lieu que dans trois mois, mais il vaut mieux prévoir. Ensuite, vous préviendrez les professeurs principaux que la réunion de cet après-midi est déplacé à 6 heures. Contactez Jennifer, j'ai vu que le premier étage de l'allée principale était sale. Dites-lui de la nettoyer convenablement. Tout doit reluire. Et donnez-lui un avertissement. Comme je la connais, ce ne sera pas le dernier pour cette session. Ah… avant toute chose, faites prévenir Menley Weaver. Je veux la voir à mon bureau le plus vite possible.

Pendant les instructions, Ursula prend des notes, debout et la tête penchée en avant. Mlle Judical pose ensuite la main sur la poignée de la porte à deux battants ou l'on voit l'inscription : " Alice Judical : directrice générale ", et plus bas " privé ". Elle s'arrête et regarde Ursula.

MLLE JUDICAL : Et par pitié, cessez de mâchouiller ces cochonneries, ça fait vraiment très mauvais genre.

Elle entre dans son bureau et ferme la porte. Seule, Ursula continue à écrire sur son bloc. Elle enlève le chewing-gum de sa bouche tout en continuant d'écrire. Elle lève la tête, semble réfléchir, note à nouveau quelque chose sur son calepin. Elle regarde son chewing-gum, essaie de le jeter dans la poubelle, mais il lui colle à la main. Elle le prend avec les doigts de son autre main, mais il colle toujours.

 

 

 20  BUREAU PRIVÉ DE MLLE JUDICAL

 

La pièce est grande. Au fond se trouve le spacieux bureau à angle avec trois fauteuils devant et un imposant fauteuil en cuir derrière. Juste derrière le bureau : une grande baie vitrée avec balcon. A droite : un mobilier de classement. Un peu plus en avant se trouve un petit salon privé avec canapé et petite table et en retrait, une cheminée. Le tout de style très moderne. Sur la gauche, un grand meuble orné de divers bibelots, diplômes et livres avec, encastré au milieu, un grand poste de télévision. Mlle Judical est assise à son bureau. Elle soupire, puis ouvre une petite boite se trouvant à sa droite, en sort un bonbon qu'elle déballe. Elle porte la sucrerie à sa bouche et ferme les yeux tout en le dégustant, appréciant visiblement la sucrerie.

 

 

 21  NANNE ET GIL A L'UNECAIN

 

Une dizaine de personnes (élèves et professeurs) se pressent dans un couloir. Nanne est parmi la petite foule. Elle marche d'un pas rapide. Derrière elle, Gil l'aperçoit.

GIL : Nanne !

Mais Nanne l'ignore. Gil arrive près d'elle.

GIL : Nanne, je te cherche partout.

Nanne regarde droit devant elle, tout en continuant à marcher. Elle pince les lèvres.

GIL : Je voulais savoir si tu t'étais inscrite aux cours de création littéraires.

NANNE : Ca t'intéresse vraiment ?

Gil fronce les sourcils

GIL : Quelque chose te contrarie ?

NANNE : Je n'ai pas du tout l'intention de m'inscrire à ces cours ridicules, tu m'entends ?

GIL : Nanne, mais enfin qu'est-ce qui ne va pas ?

Nanne s'arrête enfin et regarde Gil.

NANNE : Il me prend que je sais pourquoi tu veux me faire inscrire à ces cours… Jason m'a tout raconté.

GIL : Jason ? Mais qu'est-ce que Jason a à voir dans tout ça ?


Pour toute réponse, Nanne regarde droit devant elle.

GIL : J'ai compris ! Ce vaurien a fini par te monter contre moi…

NANNE : Arrête, tu veux ! Je te croyais mon ami.

GIL : Mais je suis ton ami, voyons.

NANNE : Oh, ça suffit. Tu ne vaux pas mieux que les autres. Vous êtes tous pareils, vous les hommes. Une seule chose vous intéresse.

GIL : Nanne, je ne comprends rien du tout. Dis-moi plutôt ce que cette ordure a pu dire sur moi.

NANNE : L'ordure, dans toute cette affaire, ce n'est certainement pas Jason.

Elle laisse Gil dans le couloir animé par les allées et venues des autres personnes. Il se fait bousculer par un passant. Il reste sans réaction et regarde dans la direction où Nanne est partie.
 


 22  DANS LA SALLE INTERDITE DE L'UNECAIN

 

La salle est enfumée et de nombreux professeurs discutent entre eux avec animation. La pièce est quelque peu en désordre. Le peu de meubles qui l'ornent ne sont pas de première jeunesse. Le contraste entre cette pièce et tout le reste de l'Unecain est flagrant.

LACEY : Et voici notre paradis : la " salle interdite "

MENLEY : Dis donc, c'est… surprenant… Enfin, je veux dire, c'est tellement différent de tout le reste de l'Unecain.

LACEY : C'est justement pour ça qu'on l'adore. Nous avons conclu un pacte avec le vieux dragon qui nous sert de directrice : cette salle est le seul endroit où il lui est interdit de mettre les pieds.

MENLEY : C'est sans doute pour ça qu'elle est tellement en désordre.

LACEY : Ah, mais je vois que tu commences à connaître le dragon, dis-moi. Tout ce qu'il y a dans cette salle ne lui ressemble pas.

Ursula frappe à la porte de la salle interdite, un bloc-notes dans les mains.

URSULA : Menley Weaver ?

Menley se retourne et regarde Ursula.

MENLEY : Oui, c'est moi.

URSULA : La directrice souhaite vous voir dans son bureau le plus rapidement possible.

Soudain, le silence se fait dans la pièce et tous les regards convergent vers Menley. Lacey s'approche plus près d'elle.

LACEY : J'ai dit qu'elle n'a pas le droit d'entrer ici… sa secrétaire, si !
 


 23  BUREAU DE MLLE JUDICAL

MLLE JUDICAL : Menley, je n'irai pas par quatre chemins. Que s'est-il passé samedi soir dernier ?

MENLEY : Que voulez-vous savoir ?

MLLE JUDICAL : Pourquoi avoir quittée précipitamment la réception qui était donnée en votre honneur, sans même un mot d'explication ?

MENLEY : Parce que Jillie, Lacey et les autres se sont excusés de leur comportement, peut-être…?

MLLE JUDICAL : Je connais les autres… mais vous, pas encore. Menley, pourquoi être partie si brutalement ? Est-ce que cela a un rapport avec Frank ?

Pas de réponse.

MLLE JUDICAL : Très bien, après tout, ce sont vos affaires. Mais comprenez bien : Si vous avez des problèmes, je ne veux en aucun cas qu'ils influent sur votre travail. Vous êtes jeune est brillante, je le sais. De plus, travailler à l'Unecain est une chance exceptionnelle. J'espère que vous avez conscience de cela. Ne me faites par regretter de vous avoir embauchée.

MENLEY : Ecoutez, Mademoiselle. Je suis vraiment désolée pour ce qui s'est passé samedi soir et je vous prie de bien vouloir accepter mes excuses. Je peux vous assurer que vous n'avez rien à craindre en ce qui concerne mon travail. Je n'ai nullement l'intention de laisser passer ma chance ici. Je puis vous garantir que vous avez fait le bon choix en m'engageant.

MLLE JUDICAL : Nous voilà donc d'accord.

Mlle Judical sourit, prend le pot où se trouvent les bonbons et le tend à Menley.

MLLE JUDICAL : Un bonbon ?

 

 

 24  RETOUR DANS LA SALLE INTERDITE

 

Gil est assis sur un bureau, une jambe qui se balance et l'autre pliée sur la table, son menton contre le genou. Lacey s'approche de lui. Il lève la tête vers elle en la voyant et Lacey pointe son index sur le bleu qu'il a à l'œil.

LACEY : Comment va-t-il ?

GIL : Qui donc ?

LACEY : Ton œil, pardi !

GIL : Ce n'est pas lui le problème.

Lacey s'assoit sur le bureau, juste à côté de lui.

LACEY : Si tu me racontais… C'est Jason le problème, je suppose.

GIL : Je crois qu'il a monté Nanne contre moi.

Lacey pousse une exclamation.

LACEY : Ah, c'est pas vraiment la nouvelle du siècle, mon grand. Je veux dire, il fallait t'y attendre. Je commence à connaître ce petit vaurien, et ça ne m'étonne pas de lui.

GIL : Je ne sais pas ce qu'il a pu lui dire, et franchement, ça ne m'intéresse pas. Ce qui me fait le plus de mal, c'est que Nanne préfère le croire lui, plutôt que moi.

LACEY : Dis donc toi : tu ne serais pas un peu amoureux d'elle ?

En guise de réponse, Gil lève les yeux vers Lacey.

LACEY : Oh, oh… tu es amoureux ! J'en étais sûre !

Gil lève la main dans sa direction, lui faisant signe s'arrêter.

GIL : Pas si fort, voyons. Inutile de mettre tout le monde au courant.

LACEY : Oh, vous feriez un couple fantastique tous les deux… Oui… sauf qu'il y a un problème.

GIL : Et de taille. Maintenant, Nanne ne m'adresse même plus la parole…

LACEY : Allez, ne t'en fais pas. Un jour, elle comprendra quel type merveilleux tu es.

GIL : Pas avec Jason Patrick dans les parages ! Je ne sais pas quel pouvoir ce parasite peut exercer sur elle, mais je t'avoue que ça me fait très peur.

LACEY : Qu'est-ce que tu veux dire par-là ?

GIL : Un jour ou l'autre, cette relation finira mal, j'en suis persuadé. Jason Patrick se sert de Nanne d'une façon perfide pour arriver à ses fins. Ca me dégoûte. Tu sais, moi aussi j'ai l'ambition un jour de décrocher un rôle et de devenir acteur, mais jamais aux dépens de quelqu'un d'autre, et surtout pas de Nanne.

Il regarde sa montre et se lève.

… Tiens, ça me fait penser qu'il faut que je me prépare pour mon audition. Je vais passer un casting pour le rôle de Dan McKay dans " l'appel de Ricky Forbes ", la nouvelle production Spelloni.

Lacey lui sourit.

LACEY : Bonne chance.

 

Alors que Gil quitte la pièce, Tim O'Connell arrive, chargé d'un grand dossier dans les bras. Il se dirige vers une table, pose le dossier et va vers la cafetière où il se sert une tasse. Il aperçoit Menley, sur sa droite, en train de lire des notes, assise devant un petit bureau. Sa tasse à la main, il se dirige vers elle.

TIM : Bonjour Menley.

Menley lève les yeux et sourit à Tim.

MENLEY : Tiens... Tim O'Connell, c'est ça ?

TIM : Tout à fait. Dites-moi, j'ai l'impression que vous préférez cette salle enfumée plutôt que le confortable bureau qu'on vous alloue.

MENLEY : Je n'ai pas encore l'habitude d'avoir un bureau à moi. Et surtout pas un si somptueux.

TIM : J'ai appris que Mlle Judical vous avez déjà convoquée.

MENLEY : Les nouvelles vont décidément très vite.

TIM : Et que vous voulez ce vieux dragon ?

MENLEY : Rien de bien méchant. Tout est arrangé. Disons que nous avons mis les choses au point.

TIM : Vous êtes une femme de tête, Menley.

MENLEY : Pourquoi dites-vous cela ?

TIM : Parce que la plupart des professeurs tremblent rien qu'en entendant le nom de Mlle Judical. On dirait qu'elle ne vous fait pas peur.

MENLEY : Pourquoi devrai-je avoir peur d'elle ?

TIM : Vous verrez, Menley… vous verrez et vous comprendrez…

Beth arrive dans la salle interdite et aperçoit Tim en discussion avec Menley. Elle pince les lèvres et se dirige vers eux. En voyant Beth, Menley perd son sourire.

BETH : Menley ? Alors, ce premier jour ?

MENLEY : Tout semble très bien se passer… pour l'instant.

BETH : J'en suis heureuse.


Elle se tourne vers Tim.

…Il faut que je te parle…

Puis regarde Menley

… Voulez-vous nous excuser ?

Menley hoche la tête, et Beth entraîne Tim dans un coin de la salle interdite, où personne ne peut les entendre.

TIM : Est-ce qu'il se passe quelque chose que je ne sais pas ?

BETH : Que veux-tu dire ?

TIM : Je ne sais pas. Dès que Menley t'as vu, elle a viré au gris. J'ai bien cru qu'elle allait avoir un malaise.

BETH : Laisse tomber cette fille pour l'instant… Tu es revenu hier.

TIM : Et alors ?

BETH : Tu aurais pu me passer un coup de fil, quand même.

TIM : Bien sûr, avec ton charmant mari à la maison.

BETH : J'en aurais fait mon affaire, de Frank. J'ai attendu que tu te manifeste, et je n'ai eu aucune nouvelle…

TIM : Ecoute, Beth. Toi et moi c'est formidable. J'aimerai que ça continue comme ça. Mais nous ne sommes pas mariés, OK ? Et en ce moment, je n'ai surtout pas besoin d'attaches. Alors lâche-moi un peu les baskets, tu veux ?


Menley observe la scène, mais elle est trop loin pour percevoir la conversation.

 

 

 25  CHEZ " TRENCH CASTING "

 

Nous sommes dans une salle décorée de façon très design. Gil arrive par la porte d'entrée. Il regarde sur sa droite et aperçoit la réception. Une jeune fille d'environ 25 ans est assise à un bureau : derrière, le logo " TC ". Il s'approche de la fille.

GIL : Excusez-moi, je viens pour l'audition prévue à 6 h 15.

LA JEUNE FEMME : Vous êtes en avance, Monsieur.

GIL : Il vaut mieux être en avance qu'en retard. Je sais que dans ce genre de casting, on ne vous attend pas.

LA JEUNE FILLE
(elle sourit) : Ca je suis d'accord avec vous, Monsieur... ?

GIL : Chabert, Gil Chabert.

Elle tend un papier à Gil.

LA JEUNE FILLE : … voici votre numéro. Prenez place dans ce couloir, et on vous appellera.

GIL : Merci.

Le papier à la main, Gil s'assoit sur une des chaises du long couloir. Plusieurs personnes occupent déjà des places. Il regarde sa montre, puis se lève et se dirige sur une petite table où sont placés des magazines. Il en choisit un. Le livre à la main, il lève la tête et aperçoit alors un homme corpulent et à ses côtés : Nanne. Ils sortent de l'agence. Intrigué, Gil va alors voir la jeune femme à la réception.

GIL : S'il vous plaît. Pourriez-vous me dire qui est l'homme qui vient de sortir à l'instant.

LA JEUNE FEMME : Oui, c'est Monsieur Trench.

GIL : Vous voulez dire : le directeur de cette agence ?

LA JEUNE FEMME : Oui.

GIL : Mais où va-t-il ?


LA JEUNE FEMME : Il rentre chez lui, Monsieur. Rassurez-vous : M. Trench est le directeur de l'agence " TC ", mais ce n'est pas lui qui fait passer les auditions. Vous n'avez rien à craindre : on va venir vous chercher très bientôt.
 


 26  LA MAISON DE TRENCH

 

Trench entre, suivi par Nanne. Il pose ses clés sur une table. La pièce est un grand salon, avec un canapé luxueux au milieu. Les meubles sont rustiques. Il fait très sombre.

TRENCH : Faites donc comme chez vous, Nanne. Je peux vous appeler Nanne ?

Nanne ne répond pas. Elle a l'air inquiet.

TRENCH : Quelque chose ne va pas ?

NANNE : C'est que je pensais qu'on dînerait en ville.

TRENCH : Oh, j'avais pensé à cela, mais j'ai commandé un repas chez un traiteur. Nous serons ainsi plus au calme pour parler de la situation de Jason. Le traiteur ne devrait pas tarder… Voulez-vous boire quelque chose ?

NANNE : Un whisky coca, si vous avez.


Trench est au bar, de l'autre côté de la pièce. Nanne, elle, ne bouge pas. Trench sert la boisson. Le verre à la main, il se tourne vers Nanne, puis se dirige vers le canapé et s'y assoit, sans cesser de la regarder.

TRENCH : Et bien, mon enfant. Ne restez pas plantée là. Venez plutôt vous asseoir.

Avec un sourire forcé, Nanne s'approche doucement du canapé, pose son sac la table basse, en face, puis choisit de s'asseoir sur un fauteuil, à l'opposé de Trench. L'homme se lève et se rassoit à l'autre extrémité du canapé, tout près de Nanne. Nanne, visiblement gênée par la situation, regarde autour d'elle.

NANNE : Vous avez une très jolie maison, M. Trench.

TRENCH : Appelez-moi Ben.

NANNE : Vous savez. Jason est vraiment fait pour le rôle de Dan McKay. C'est un acteur vraiment génial.

TRENCH : Ce n'est pas vraiment Jason qui m'intéresse en ce moment.

Il pose sa main sur le genou de Nanne. Celle-ci fait un bond et se lève. Elle marche dans la pièce. Son verre encore plein dans la main.

NANNE (essayant de masquer sa nervosité) : Jason m'a dit que vous êtes assez aimable pour lui laisser une chance d'auditionner. Croyez-moi, vous ne le regretterez pas.

Trench se lève à son tour et s'approche de Nanne.

TRENCH : Il ne tient qu'à vous de faire de Jason Patrick une star.

NANNE (d'une voix hésitante) : Je ne comprends pas. Que voulez-vous dire ?


Trench se met à rire.

TRENCH : Allons, ne faites pas l'innocente, voyons. J'ai été très clair à ce sujet avec votre parasite de petit ami.

Trench fait face à Nanne et pose délicatement la main sur la cuisse de la jeune fille.

NANNE : Mais arrêtez ! Que faites-vous ?

TRENCH : Tu sais très bien ce que je fais. Et tu es là pour ça.

Il serre Nanne contre lui et essaye de l'embrasser. Nanne, de toutes ses forces, se débat et le repousse. Trench fait un pas en arrière.

NANNE : Vous êtes complètement fou. Je suis sortie avec vous uniquement pour dîner, sans plus.

TRENCH : Non, mais tu me prends pour un imbécile, ma petite ! Si tu crois que je vais me contenter d'un gentil dîner en ta compagnie, tu te trompes. Si je veux dîner avec quelqu'un, j'invite mon chien.


A ce même moment, Gil sonne à la porte. Afin d'échapper à Trench, Nanne se précipite vers la porte d'entrée.

NANNE : Ce doit être le traiteur.

Trench la rattrape par le bras et la fait pivoter. Ils se font face.

TRENCH : Je n'ai jamais appelé de traiteur…

Il la regarde de haut en bas.

… J'ai autre chose à déguster que des crevettes et du caviar… si tu vois ce que je veux dire.

Trench tient toujours Nanne par le bras. De sa main libre, qui tient le verre, Nanne lui jette le liquide en plein visage. Trench serre Nanne contre lui. Son visage trempé exprime de la colère.

TRENCH : Espèce de…

Il entraîne Nanne près de la petite table et la jette sur le canapé. Nanne fait tomber son verre par terre. Il se met alors sur elle, la caresse et l'embrasse. Nanne se débat, mais Trench a le dessus. Il lui bloque les poignées avec ses deux mains.
A l'extérieur, Gil sonne une nouvelle fois. Il regarde à gauche, puis à droite. Il aperçoit alors une grande fenêtre. Il se dirige vers elle et regarde à l'intérieur. A travers la vitre, il voit Trench qui se débat avec Nanne sur le canapé.
Il court vers la porte d'entrée et frappe des coups violents.

GIL : Hé, hé….

Nanne se débat et crie alors que Trench lui déchire le haut de sa robe.
Gil regarde autour de lui. A sa gauche, il y a un petit patio avec des chaises et des tables. Il s'y dirige, saisit une chaise et cours vers la grande fenêtre. Il balance la chaise dans la fenêtre. La grande vitre se casse.
A l'intérieur, Trench se retourne, surpris. Mais il ne lâche pas Nanne. Gil enjambe la fenêtre. Il est maintenant à l'intérieur. Il court vers le canapé et empoigne Trench. Il lui assène un coup de poing au ventre tellement violent que l'homme tombe à la renverse. Nanne se lève et court se réfugier dans les bras de Gil.

GIL : Est-ce que ça va ?

Nanne pleure.

GIL : Est-ce qu'il ?…

NANNE : Non, ça va aller.
 


 27  DEVANT L'APPARTEMENT DE NANNE

GIL : Tu veux que je rentre ?

NANNE : Non, Gil. Tout va bien.

GIL
(en parlant de Jason): Est-ce qu'il est là ?

NANNE : Non. Jason passe ses lundis soirs à jouer au poker avec des amis. Il ne revient pas avant tard la nuit.

GIL : Tu es sûre que tout va bien ? Tu n'as besoin de rien ?

NANNE : Non. Ou plutôt si. J'aimerais rester seule.

GIL : Très bien. Mais si tu as besoin de quoi que ce soit…

Nanne sourit et hoche la tête d'un air entendu.
 


 28  CHEZ LES FARRIS

 

Nous sommes dans la chambre des Farris. Grande pièce avec un lit blanc et très spacieux. Sur la droite, une commode et à côté une grande coiffeuse. En face du lit, une grande armoire avec miroir. Kelly est dans son lit. Les jambes repliées, elle lit un livre. Stuart arrive et enlève sa chemise.

STUART : Tu n'as presque rien mangé ce soir au dîner. Est-ce que tout va bien ?

KELLY : Je n'avais pas très faim, c'est tout.

STUART : Ecoute, chérie. Je voulais te dire à quel point je suis désolé pour ce qui s'est passé l'autre soir.

KELLY : N'en parlons plus.

STUART : Très bien. Alors, comment s'est passée ta première journée à l'Unecain ?

KELLY : Très bien.

Kelly continue de lire. Stuart se plonge dans le lit et embrasse sa femme sur la joue. Son regard dévie vers le livre. Il prend le livre des mains de Kelly, le regarde et pousse un soupir.

STUART : Oh, c'est pas vrai ! Ca ne va pas recommencer.

Kelly reprend le livre des mains de Stuart.

KELLY : Laisse ce bouquin tranquille.

STUART : Kelly… Je croyais que tu étais guérie…

KELLY : On ne peut pas guérir de ça. Ecoute, Stuart. Tout ce que j'ai vécue il y a quelques mois, je ne l'ai pas inventé… Crois-moi, je t'en prie.

STUART : Ma chérie… nous avons parlé de ça des centaines de fois… Tout ça c'est la faute de cette Menley Weaver.

KELLY : Menley n'a rien à voir avec tout ça.


STUART : Chérie… tu avais fait beaucoup de progrès ces derniers temps. Ton analyste disait que tu te remettais doucement. Tu avais presque réussi à oublier cette histoire et maintenant…

KELLY : Oublier… oublier… Stuart, il ne se passe pas une journée sans que je ne repense à ce qui m'est arrivée. Jamais je ne pourrai l'oublier. Je n'en parle plus parce que de toute façon personne ne veut me croire…


Elle se lève, pivote sur elle-même et regarde Stuart.

… Mais je l'ai vécue et cette aventure me poursuivra jusqu'à la fin de ma vie. Je compte bien demander de l'aide à Menley. Je crois qu'elle est intelligente et qu'elle me croira. Elle m'aidera, j'en suis sûre.

STUART : Kelly, tu n'es pas sérieuse ?

KELLY : Oh que si. Je n'ai jamais été aussi sérieuse.

A son tour, Stuart se lève.

STUART : Très bien. Si tu veux qu'une autre personne te crois folle, c'est ton problème. Tu vas une nouvelle fois te ridiculiser avec cette histoire stupide…

Stuart est près de la porte qui mène au couloir.

… Mais je te préviens, je ne suis pas certain de supporter ça plus longtemps.

Il quitte la pièce et claque la porte.
 


 29  DANS L'APPARTEMENT DE NANNE, LE LENDEMAIN MATIN

 

Nous sommes dans le salon de Nanne. Elle est en peignoir de bain. Les cheveux encore en bataille, elle vient à peine de se réveiller. Elle s'assoit sur le canapé et se sert un café dans une grande tasse qui se trouve sur la petite table, à droite du canapé. Elle boit une gorgée du liquide lorsque la porte d'entrée s'ouvre brutalement sur Jason. Nanne se lève brusquement, pose la tasse sur la table et s'approche de lui.

NANNE : Jason, mais où étais-tu cette nuit ?

JASON
(ignorant la question) : Comment as-tu pu me faire une chose pareille ?

NANNE : Quoi ?

JASON : Je viens de parler à Trench. Il m'a tout raconté pour hier soir. Tout est fichu… et par ta faute.

NANNE : Par ma faute ! Mais Jason, ce type voulait me violer, tu ne comprends pas.

JASON : Je comprends simplement que jamais je n'aurai dû te faire confiance. Tous mes projets tombent à l'eau.


Il élève la voix.

…Je t'avais pourtant dit à quel point je voulais ce job.

NANNE : Je n'arrive pas à y croire. Tu aurais voulu que je couche avec ce… monstre uniquement pour ton job ?

JASON : Après tout ce que j'ai fait pour toi, c'était la moindre des choses, non ?

NANNE : Jason, sors d'ici !


JASON : C'était pourtant pas compliqué de coucher avec ce type. Au lieu de ça, ton chevalier servant est venu semer sa merde. Ah, au fait, Trench veut qu'on lui rembourse la vitre. Je mettrai ça sur ton compte.

NANNE : Gil avait raison, tu n'es qu'une belle ordure.

JASON : Je veux que tu ailles voir Trench. Tu vas t'excuser et lui donner à nouveau rendez-vous ce soir.


NANNE : Jason, mais tu es fou. Fiche le camp d'ici. Je ne veux plus te voir.

JASON : Nanne, je t'ai dit que je ferai n'importe quoi pour ce boulot.


Il l'agrippe violemment par bras.

JASON (menaçant) : Tu ne voudrais pas que je me mette en colère ?

NANNE : Jason, je t'en prie. Sors d'ici… et sors de ma vie.

JASON : Très bien. Je vais sortir de ta vie, mais pas avant d'avoir ce rôle, tu m'entends. Après tout ce que j'ai fait pour toi, ce n'est pas maintenant que tu vas me laisser tomber.

Jason, qui tient toujours le bras de Nanne, se baisse légèrement pour prendre le téléphone mobile posé sur la petite table.

JASON : Appelle !

NANNE : Jason…


JASON (criant) : Appelle ! ! !

Nanne sursaute.

NANNE : Jason, tu me fais peur.

JASON : Tu vas appeler, oui ou non ?


Nanne pleure, tandis que Jason a les yeux exorbités par la colère et la détermination.

NANNE : Non, je ne peux pas.

Jason jette alors le mobile sur le canapé, et frappe violemment Nanne au visage. Elle crie et tombe à terre. Jason la relève et la pousse sur toute la longueur de la pièce. Elle bute contre un meuble et tombe, en criant. Elle porte la main sur ses lèvres et découvre qu'elle saigne. Jason prend le mobile sur le canapé, avance vers Nanne qui est pétrifiée. Il lui tend le téléphone. Nanne, en pleurant, prend doucement le téléphone.
 


 30  BUREAU DE GIL, A L'UNECAIN

LACEY : Quelle histoire ! Je n'arrive pas à y croire. Et Nanne, comment va-t-elle ?

GIL : Apparemment bien. Mais elle a reçu un sacré choc.

LACEY : Pauvre Nanne.

GIL : Oui, j'espère que maintenant, Nanne a ouvert les yeux en ce qui concerne Jason. Tu sais, hier soir, j'ai vraiment eu très peur pour elle.

LACEY : Oui. Mais l'important, c'est qu'elle n'ait rien.

Gil, qui se trouve face à Lacey, regarde devant lui. La porte de son bureau est ouverte et il voit Nanne passer dans le couloir.

GIL : Tiens, justement, la voilà… Je te retrouve au déjeuner.

Gil fonce vers le couloir.

GIL : Nanne !

Nanne ne lui répond pas et continue sa marche rapide. Elle porte des lunettes.

GIL : Nanne, il faut que je te parle. J'ai plein de choses à te dire.

NANNE : Pas maintenant,Gil.


Mais Gil la rattrape

GIL : Nanne. Ca ne sert à rien de vouloir m'éviter. Il faut qu'on parle. Je sais ce que tu peux ressentir…

NANNE : Non, tu ne sais rien. Laisse-moi tranquille, Gil.

GIL : Mais Nanne, je veux t'aider… laisse-moi t'aider, tu veux.

NANNE : Tu ne peux rien pour moi.

Gil avance un peu plus vite que Nanne et pivote, de façon à se mettre juste devant elle. Nanne détourne alors les yeux. De sa main, Gil prend le menton de Nanne et découvre une ecchymose sur le coin de la lèvre.

GIL : Oh, mon Dieu, mais qu'est-ce…

Gil ôte les lunettes noires de Nanne est découvre un énorme bleu sur le coin de l'œil. Nanne détourne la tête. Elle pleure. Le visage de Gil se contracte.

GIL : C'est Jason qui t'a fait ça ?…

Pas de réponse.

… C'est lui, n'est-ce pas ?

Toujours pas de réponse. Nanne baisse la tête. Gil fait une moue qui exprime la colère.

GIL : Cette espèce de…

Il laisse Nanne et se précipite dans le couloir, dans le sens inverse. Nanne se tourne vers Gil.

NANNE : Gil, non !

Gil sort précipitamment de l'établissement. Il dévale les escaliers de l'entrée. Nanne le rattrape.

NANNE : Gil, mais où vas-tu ?

Il s'arrête et regarde Nanne.

GIL : Cette petite frappe va voir de quel bois je me chauffe. Je suppose qu'il est dans ton appartement.

NANNE : Non, Gil. N'y va pas. S'il te plaît.


Mais Gil, aveuglé par la colère, ne l'écoute pas.

NANNE : Gil ! ! !
 


 31  DANS L'APPARTEMENT DE NANNE

 

Jason se trouve dans le salon. La porte d'entrée s'ouvre brutalement. Le visage de Gil trahit la colère et la haine. Sans explication, il fonce sur Jason. Ce dernier se dresse, surpris. Gil lui assène un coup de poing qui le jette à terre. Jason se relève et les deux hommes battent. Jason lui donne un droit sur la joue. Gil le prend et se jette avec lui sur le canapé. Ils tombent du canapé. Jason se relève et frappe Gil, qui tombe sur un lampadaire. Jason se saisit de la cafetière, près du canapé, et la lance au de Gil, qui l'esquive. La cafetière termine sa course sur le mur. Gil saisit Jason, et le frappe à nouveau. Durant la lutte, ils se déplacent. Ils sont maintenant près de la baie vitrée qui donne sur le balcon. Gil frappe à nouveau Jason et les deux hommes sont maintenant sur le vaste balcon. A la droite de Jason, une table et quatre chaises. Jason saisit une chaise et frappe Gil, qui se cogne contre le mur et tombe. Jason reprend son souffle alors que Gil est à terre. Ensuite il saisit Gil par le col, et le plaque au mur. Gil se dégage en lui donnant un coup de genou. Jason est plié en deux et Gil en profite pour lui asséner un coup de poing au visage. Jason se redresse et reçoit un autre coup, cette fois au ventre. Il riposte en saisissant Gil et en le projetant de l'autre côté du balcon. Jason se précipite sur lui. Les deux hommes sont hors d'haleine, et arrivent à peine à tenir debout. Nanne entre dans l'appartement. Elle est devant la porte d'entrée.

NANNE : Gil ! ! !

Gil est près de la balustrade. Jason est devant lui. En entendant Nanne crier, Gil s'arrête brusquement et regarde dans la direction de Nanne. Jason en profite alors pour lui asséner un coup de poing au visage. La violence du coup propulse Gil sur la balustrade. Il perd l'équilibre et tombe du balcon. Nanne pousse un cri d'horreur.

NANNE : GIL ! ! !

Elle se précipite sur le balcon pour aller vers la balustrade, mais Jason la retient. Elle se débat.

NANNE : Lâche-moi.

Elle arrive à se dégager de Jason et va à la balustrade. Elle regarde alors dans le vide.

NANNE : Oh, mon dieu. Mon dieu ! ! !

Elle se tourne vers Jason, les yeux ravagés par les larmes.

…Regarde ce que tu as fait. Assassin !

Jason continue à reprendre son souffle. Nanne sort du balcon et se précipite sur le téléphone. Jason la suit, et lui prend le combiné des mains.

JASON : Mais qu'est-ce que tu fais ?

NANNE : J'appelle une ambulance.

JASON : Ce n'est pas la peine, il est mort.


NANNE : Mais Jason…

JASON : Ecoute. C'est un accident, tu m'entends. Rien qu'un accident.

NANNE : Tu l'as tué… tu l'as tué… tu l'as tué…

La voix de Nanne devient hystérique. Jason la frappe au visage et Nanne arrive à se calmer. Elle reprend le téléphone des mains de Jason.

NANNE : J'appelle la police.

Jason lui reprend le téléphone et le jette contre le mur.

NANNE : Mais Jason, on ne peut pas le laisser comme ça. Il faut prévenir quelqu'un.

Jason regarde Nanne avec un air de furie qui terrifie la jeune fille.

NANNE : Très bien, c'était un accident. J'étais là et j'ai vu ce qui s'est passé. C'était un accident, tu as raison. Je le dirai à la police.

JASON : Tu ne diras rien à la police. Ecoute, Nanne, la police ne nous croira jamais si on lui dit que c'est un accident.

NANNE : Qu'est-ce que tu comptes faire alors ?

Jason prend le bras de Nanne et l'entraîne vers la sortie.

JASON : Viens…

NANNE : Jason, mais qu'est-ce que tu fais ?


Jason s'arrête et regarde Nanne.

JASON : Nanne, tu ne comprends pas ! La police ne croira jamais à un accident. Il faut déguerpir d'ici, et vite !

NANNE : Jason, je ne peux pas partir. Pas en laissant Gil…

JASON : On ne peut plus rien faire pour lui de toute façon. Ecoute, Nanne…


Il la secoue

…Je t'en prie, écoute-moi. La meilleure chose à faire est de partir le plus loin possible d'ici. Jamais les flics ne nous laisserons tranquille.

NANNE : Mais si je leur explique ce qui s'est vraiment passé.

JASON : Pour être accusée de complicité de meurtre ? Est-ce que c'est ça que tu veux… ?

Il traîne Nanne jusqu'à la sortie.

… Maintenant tu ne discutes pas. Tu viens avec moi.

Nanne tente de lui résister

NANNE : Jason ! Non, non !

Mais Jason est plus fort. Ils sortent de la pièce et Jason ferme la porte. Gil est étendu sur le balcon de l'appartement de dessous. Un filet de sang coule au coin de ses lèvres.

 

 

 GÉNÉRIQUE DE FIN