1  UN QUARTIER RéSIDENTIEL, À SACRAMENTO
 

Menley et Lacey sont dans la voiture, en face d'une maison.

LACEY : Qu'est-ce qu'on attend au juste ?

MENLEY : La maison est fermée. J'espère que la femme va bientôt arriver. On en saura plus quand on pourra lui parler.

LACEY : OK, inspecteur Cagney.

MENLEY (qui ne comprend pas) : Quoi ?

LACEY : Inspecteur Cagney. Tu me fais penser à elle… Cagney. Et moi je suis Lacey… (Menley semble toujours ne pas comprendre)… Cagney et Lacey. (voyant que Menley ne comprend pas) Bon, ben laisse tomber, va.

MENLEY : Regarde, elle arrive.

Une femme gare sa voiture devant la maison.

MENLEY : C'est le moment de vérité.

Lacey et Menley sortent à leur tour de leur voiture et interpellent la dame.

MENLEY : Madame, s'il vous plaît.

LA DAME : Oui, je peux vous aider.

MENLEY : Nous voudrions parler à Jane Strombaski.

JANE : C'est bien moi. Mais écoutez, si c'est pour une réunion Tupp…

MENLEY : Non, non, pas du tout. En fait, nous voudrions avoir des renseignements sur Stuart Farris.

Le visage de la femme se ferme.

JANE : Qui êtes-vous ?

LACEY : Peu importe qui nous sommes, Madame, il est important que nous sachions à quoi nous en tenir au sujet de Stuart. Au téléphone, vous avez…

JANE (l'interrompant) : Ah, c'est vous qui m'avez appelé…

LACEY : Oui.

JANE : Je ne veux plus rien savoir de ce type, vous m'entendez ! Pourquoi venir remuer le passé ?

MENLEY : C'est très important, Madame. Je dirais même que c'est une question de vie ou de mort.

Jane fait mine de partir, mais Menley l'attrape par le bras.

MENLEY : S'il vous plaît. La vie d'une femme est en jeu.

Jane baisse la tête.

MENLEY : Dites-nous ce que vous reprochez à Stuart Farris.

JANE : Ce que je lui reproche… (elle laisse sa phrase en suspens)

LACEY : Vous ne semblez guère l'apprécier.

JANE : Je le déteste, oui.

MENLEY : Mais pourquoi ?

JANE (pesant ses mots) : Parce que Stuart Farris a tué ma sœur.

Silence…

 

 2  LE LAC DE GREAT GARDEN


Le corps d'une femme flotte à la surface de l'eau. On ne distingue pas son visage, mais la chevelure de la jeune femme et sa physionomie ressemblent étrangement à Kelly Farris.

 

 GÉNÉRIQUE DE DÉBUT

 SPECIAL GUEST STARS

 

 

 3  RETOUR A SACRAMENTO


Jane se promène avec Lacey et Menley dans une rue d'un quartier très chic.

JANE : C'était le jour même du bal de promo. Stuart Farris avait des vues sur Samantha depuis très longtemps. Mais ma sœur n'éprouvait rien pour lui. Il faut dire qu'il était toujours hautain, il ne pensait qu'à lui et on devait toujours faire ses quatre volontés, sans quoi il pouvait vous détruire en un rien de temps. Samantha a finalement accepté de sortir avec lui ce fameux soir. Je le lui avais vivement déconseillé car je savais qu'il en profiterait pour lui sauter dessus à la première occasion. Tout ce qu'il voulait en fait, c'était l'avoir dans son lit. Lorsqu'au cours du bal, il a proposé à Sam de l'emmener faire un tour au lac de Great Garden, je savais qu'il se passerait quelque chose de très grave. Je savais qu'il voudrait coucher avec elle et je savais aussi, la connaissant bien, qu'elle refuserait. Elle a accepté… Ils sont partis ensemble, mais Stuart est revenu seul.

MENLEY : Dans quel état d'esprit était-il ?

JANE : Il faisait semblant d'être paniqué en disant que Sam était tombée à l'eau et qu'il n'avait rien pu faire.

LACEY : Vous ne l'avez pas cru ?

JANE : Pas un seul instant ! Vous savez, lorsqu'on est jumelle, on possède un sixième sens, une sorte de télépathie entre sœurs et je pouvais presque voir comment s'était déroulée la scène : Stuart Farris a voulu faire des choses avec elle, elle s'est débattue et… (sa voix se casse) elle est tombée à l'eau (elle pleure maintenant) et ce salaud n'a rien fait pour la sauver…

Les trois femmes stoppent leur marche. Menley et Lacey se regardent.

 

 4  AU POSTE DE POLICE


Menley et Lacey sont dans le bureau de Track, devant le détective. En retrait, Susan Weight est assise sur une chaise.

TRACK : Premièrement, ce que vous avez soi-disant découvert ne prouve rien, et deuxièmement, vous n'aidez pas la police en agissant comme ça. Si vous voulez un bon conseil, laissez tomber cette affaire et retournez à vos classeurs, mesdames.

LACEY : Toujours aussi agréable, à ce que je vois !

MENLEY : Mais écoutez, ce n'est pas possible ! Vous devriez au moins interroger Stuart, voyons !

TRACK : Mlle Weaver, je connais mon job, et j'ai bien entendu mis mon nez dans cette affaire. Il se trouve qu'il n'y a rien qui puisse prouver que Farris a tué Samantha Strombaski. L'enquête a prouvé qu'elle est tombée à l'eau et s'est noyée, un point c'est tout.

Menley, assise jusqu'à présent, se lève.

MENLEY : Vous pouvez dire ce que vous voulez, mais moi je reste persuadée que Stuart a fait tuer Kelly. Et je n'aurais pas de paix tant que ce type ne sera pas là ou il doit l'être, c'est à dire derrière les barreaux.

Sur ce, elle quitte le poste de police. Lacey se lève à son tour et, moqueuse, s'adresse à Track.

LACEY : Elle est pas commode, hein, ma copine ?

 

 5  UNE RUE à GARDEN PLACE


Menley et Lacey marchent. Nous sommes en plein dans le boum de 17h00 et il y a beaucoup de monde.

LACEY : Je crois que Track a raison.

MENLEY : Quoi ?

LACEY : On devrait laisser tomber.

MENLEY : Et c'est toi qui me dit ça ?

LACEY : Ecoute Menley, si tu te remémores le discours de Jane, rien ne nous prouve que Stuart a tué Samantha. Personne n'était là pour le voir.

MENLEY (élevant la voix) : Oh, je t'en prie Lacey. Moi je vois que Kelly a disparu, je vois la serviette pleine de sang et je vois Stuart en train de nettoyer l'armoire. Voilà ce que je vois.

LACEY (découragée) : Tout ça ne nous mènera à rien. Il faut être logique. On en saura peut-être plus une fois qu'on aura retrouver Kelly.

MENLEY : Si on la retrouve un jour.

 

 6  DANS LA CHAMBRE DE SIRIA, à L'HÔPITAL


Siria est toujours dans le coma, sa mère Maria à ses côtés, prie. En retrait, Milio commence à s'endormir sur sa chaise.

Soudain, les doigts de la main droite de la patiente commence à bouger. Dans un premier temps, Maria ne le voit pas. Elle continue de prier en silence. Puis le bras de la jeune femme se soulève doucement. Maria sort de sa prière, étonnée. Les yeux de Siria s'ouvrent lentement. Elle remue un peu la tête et murmure. Maria se lève vivement.

MARIA : Siria ! Oh, mon Dieu merci… merci…

Milio, qui somnolait, est réveillé par ces mots. Il court au chevet de sa sœur. Maria sort brusquement de la chambre pour appeler un médecin. Pendant ce temps, Milio regarde sa sœur et sourit.

MILIO : Bienvenue dans le monde des vivants, sœurette.

 

 7  BUREAU DU DOCTEUR KIRIOS


Devant Milio et Maria, le médecin affiche un sourire rassurant.

DR KIRIOS : Siria est une jeune fille très forte, vous savez. On peut dire qu'elle revient de loin. Son subconscient a puisé la force nécessaire pour se réveiller du coma.

MARIA : C'est avec la grâce de Dieu. Je n'ai pas cessé de prier docteur, pour qu'elle puisse enfin se réveiller.

DR KIRIOS : Toujours est-il que le plus grave est passé maintenant. Les derniers examens effectués sont encourageants. Ce sera sans doute long, mais comme vous le dites, avec l'aide de Dieu, votre fille s'en sortira.

Milio et Maria poussent un soupir de soulagement.

MARIA : Merci docteur, merci…

 

 8  À GREAT GARDEN, LE MATIN


Lacey se promène dans une grande allée en compagnie de Gil. De très beaux arbres ornent ce coin paradisiaque. Lacey respire l'air frais et sourit.

LACEY : Comme c'est agréable de pouvoir se promener dans la nature juste avant mon cours de musique. Ou plutôt avant mon cours de cacophonie générale, parce que vraiment, j'ai des élèves qui confondent la clé de sol avec un produit pour laver le carrelage.

Gil se met à rire.

GIL : Menley n'est pas avec toi ?

LACEY : Non, elle avait encore des copies à corriger avant d'aller à l'Unecain.

GIL : Je suis ravi de voir qu'elle travaille encore. Ces derniers temps, elle est obnubilée par la disparition de Kelly.

LACEY : Nous sommes tous bouleversés et inquiets pour Kelly, mais je crois que Menley en fait une fixation, et ce n'est pas bien pour elle. J'ai essayé de lui en parler, mais elle ne veut rien savoir.

GIL : Je me fais du soucis pour elle.

LACEY : Si Menley est tellement dans cette affaire, c'est pour fuir ses propres problèmes.

GIL : Ouais, c'est beaucoup plus facile de vouloir résoudre les problèmes des autres, lorsque nous même avons nos propres démons.

LACEY (pensive) : Je crois savoir ce qui pourrait aider Menley à résoudre ses problèmes…

Gil hoche la tête. Ils se regardent.

LACEY & GIL (ensemble) : Frank.

LACEY : On devrait pouvoir faire quelque chose.

GIL (en souriant) : Oh, te connaissant, tu vas bien trouver.

Soudain, Lacey regarde par dessus l'épaule de Gil et fronce les sourcils. Derrière s'étend le lac de Great Garden.

LACEY : Qu'est-ce que…

Gil se retourne. Derrière lui, un attroupement de badauds et deux voitures de police.

GIL : Apparemment, il se passe quelque chose là-bas.

Nos deux amis courent en direction du remue ménage. Lacey n'hésite pas à bousculer des badauds.

LACEY : Que se passe-t-il ?

UN BADAUD : On vient de repêcher le corps d'une femme noyée.

Lacey regarde. Gil vient à ses côtés. Les deux personnes écarquillent les yeux lorsqu'ils voient un homme en combinaison, tenant une femme dans ses bras. Sa chevelure blonde emmêlée ne leur permet pas de distinguer son visage.

LACEY : Oh, mon Dieu.

GIL : On dirait Kelly !

Un policier s'approche d'eux.

LE POLICIER : Allons, ne restez pas ici, s'il vous plaît.

LACEY : Qui est cette femme ?

LE POLICIER : Vous feriez mieux de rentrer, maintenant.

LACEY : Mais vous ne comprenez pas…

GIL : Cette femme ressemble à une de nos amies qui a disparu depuis quelques jours.

LACEY : Kelly, Kelly Farris.

LE POLICIER : La femme qui vient d'être repêchée n'avait pas de papier sur elle. Nous ne savons pas qui cela peut être.

Lacey fait un pas en avant. Mais elle est rattrapée par le policier.

LE POLICIER : Oh la, pas si vite ! Ou vous allez comme ça ?

LACEY : Je veux en avoir le cœur net. Je vous dis que cette femme ressemble à mon amie.

LE POLICIER : Vous n'avez pas le droit, madame.

Lacey regarde le policier avec détermination.

LE POLICIER : Ecoutez, donnez-moi l'adresse de la famille de votre amie, et nous la contacterons.

LACEY (avec résignation) : 80526 Garden View.

 

 9  DANS LE COULOIR DE L'HÔPITAL


Mlle Judical et Joe longent dans le couloir. Mlle Judical a un bouquet de fleurs dans la main. Elle sourit.

MLLE JUDICAL : Je crois savoir que les roses blanches sont les préférées de Jillie.

JOE : Elle va être ravie. Ca me fait penser qu'il faut que je vous en offre plus souvent.

MLLE JUDICAL (souriant) : Voyons Joe, vous savez très bien que vous me gâtez de trop.

JOE : On ne vous gâte jamais de trop.

Ils arrivent, ravis, devant la chambre de Jillie. Soudain, le sourire de Mlle Judical s'efface. Elle est dans l'encadrement de la porte. La chambre est vide. Le lit est bien fait, ce qui prouve que Jillie a quitté l'hôpital. Mlle Judical entre dans la pièce, suivie de Joe.

MLLE JUDICAL : Jillie n'est plus là.

JOE : Si elle n'est plus à l'hôpital, je crois que vous savez ce que cela signifie.

Mlle Judical secoue tristement la tête.

MLLE JUDICAL : J'en ai bien peur.

 

 10  AU POSTE DE POLICE


Un policier plonge les doigts de Jillie un à un dans l'encre, puis sur un document. Ensuite Jillie, telle une automate, se conforme au désagréable rite des photos qui serviront pour le casier judiciaire. Elle semble ne pas réagir à tout ce qui se passe, comme si elle était dans un rêve. On pourrait presque croire qu'elle ne comprend pas se qui lui arrive.

 

 

 11  DANS LE BUREAU DU COMMISSAIRE FOLLET


Follet est avec Mlle Judical et Joe.

FOLLET : Ecoutez, ce n'est une surprise pour personne. Je vous rappelle que Jillie Perkins est inculpée.

JOE : Mais vous auriez quand même pu nous prévenir, non ?

FOLLET : Vous êtes de la famille ? Non ! Alors pourquoi je l'aurais fait ?

MLLE JUDICAL (ignorant la confrontation) : Que va-t-il se passer pour elle maintenant ?

FOLLET : Jillie passe au tribunal cet après-midi pour déterminer le montant de la caution. Si vous voulez qu'elle soit libérée, tâchez d'être là.

 

 12  À LA MORGUE


D'un pas très lent, Stuart, accompagné de Susan et Track, marche le long des casiers réservés aux morts. Leurs pas résonnent, donnant à la scène un aspect macabre. Un médecin, en blouse blanche, attend devant un "tiroir" ouvert. Le cadavre qui s'y trouve est enveloppé d'un drap blanc. Digne, Stuart arrive devant et regarde le médecin dans les yeux.

LE MEDECIN : M. Farris ?

Il hoche la tête.

LE MEDECIN : Vous êtes prêt ?

STUART : Est-ce qu'on peut arriver à être prêt dans ce genre de situation ?

Le médecin ne répond pas, il découvre le cadavre. Stuart continue à regarder le médecin, craignant sans doute de regarder le cadavre. Il transpire de partout. Il finit par baisser doucement les yeux vers le corps. Il pousse un énorme soupir de soulagement.

STUART : Ce n'est pas elle. Ce n'est pas Kelly. Mon Dieu, ce n'est pas elle !

 

 13  APPARTEMENT DE GIL


Il fait cuire un rôti tout en sifflotant, vêtu d'un tablier ou il est inscrit "Kiss the cook". On sonne à la porte. Toujours en sifflotant, Gil va ouvrir et découvre Nanne en pleurs.

GIL : Nanne, mais qu'est-ce que tu as ?

NANNE : C'est ma tante de New York. Elle vient de mourir.

GIL : Je suis désolé. Mais entre un instant.

NANNE (tout en entrant dans la pièce principale) : Maman m'a dit qu'elle n'a pas eu le temps de se rendre compte de se qui lui arrivait.

GIL : Tu étais très liée à elle, je crois.

NANNE : Oui, c'était comme une deuxième mère pour moi.

GIL : Est-ce que tu veux boire quelque chose ?

NANNE : Non, non, il faut que je parte. Je suis venir te dire que j'allais aux obsèques à New York. Je ne voulais pas partir avant d'avoir fait définitivement la paix avec toi, tu comprends ?

GIL : Tu parles de la dernière fois chez Bronski ?

NANNE : Oui. Je suis désolée Gil. Tu avais raison sur toute la ligne au sujet de Tim. Il ne s'est jamais intéressé à moi.

GIL : Je suis content que tu t'en sois aperçu maintenant, et avant qu'il ne soit trop tard.

NANNE : On fait la paix ?

GIL (souriant) : Mais oui, bien sûr.

NANNE : Parfait. Je partirai plus tranquille comme ça.

Gil prend Nanne dans ses bras affectueusement.

GIL : Prends soin de toi à New York, petite Nanne.

NANNE : J'ai demandé à Mlle Judical une semaine de congés. Je vais probablement rester à New York pour Halloween.

GIL : Passe le bonjour à toute ta famille et dis-leur que je suis avec eux.

 

 14  AU TRIBUNAL


Jillie est debout devant le juge Clemens qui se prononce. Mlle Judical et Joe, eux, sont assis au premier rang des places pour le public.

LE JUGE CLEMENS : Ayant écouter les deux parties, je peux maintenant me prononcer. Jillie Perkins, l'acte que vous avez commis est grave et a mis la population en danger. Néanmoins, comme votre casier judiciaire ne comporte aucune infraction majeure à ce jour, je fixe le montant de la caution à 50.000 dollars.

Jillie ne dit rien. Mlle Judical ferme les yeux de soulagement. Puis elle se lève vivement.

MLLE JUDICAL (à Joe) : Jillie ne va pas rester longtemps en prison. J'appelle ma banque immédiatement.

Avant de partir, elle pose un regard rassurant sur Jillie.

 

 15  À L'HÔPITAL, DANS LA CHAMBRE DE SIRIA


On peut voir que Siria va beaucoup mieux maintenant. Elle est même assise sur son lit, en train de lire. Sa mère est à côté d'elle.

MARIA : Siria, ma chérie, tu devrais te reposer un peu. Tu es encore très faible.

SIRIA : Maman, j'ai pris trop de retard dans mes cours.

MARIA : Qu'est-ce qui est plus important ? Ta santé ou tes cours ?

Siria regarde sa mère. Elle n'a pas le temps de répondre parce que son frère Milio entre dans la pièce, un gros bouquet de fleurs à la main. Siria sourit. Maria chuchote un sifflement entre ses dents.

SIRIA : Ouah, tout ça pour moi ?

MILIO (souriant) : Rien n'est trop beau pour la plus belle des sœurs.

SIRIA (en prenant les fleurs) : Tu me flattes de trop, toi.

MILIO : Comment tu vas ?

SIRIA : Tu le vois bien, comment je vais. Super bien.

MILIO : Je suis content. On a beaucoup prié pour toi.

SIRIA (fermant les yeux) : Oui, je sais.

MARIA : Je vais aller chercher un magazine. Tu veux que je te rapporte quelque chose, ma chérie ?

SIRIA : Non merci Maman.

MARIA : A tout de suite.

Maria se lève et quitte la chambre. Siria est désormais seule avec Milio.

SIRIA : Milio, dis-moi, est-ce que tu as des nouvelles de Mlle Perkins ?

Le visage, jusqu'alors détendu de Milio, se crispe. On voit bien que c'est un sujet qu'il ne voulait pas aborder.

MILIO : Pourquoi tu me demandes ça ?

SIRIA : Pour savoir, c'est tout. Personne ne me dis rien sur elle.

MILIO : Et c'est tant mieux comme ça, crois-moi.

SIRIA : Elle est sortie de l'hôpital ?

MILIO : Oui.

SIRIA : Et elle va bien ? Je veux dire, elle n'a pas de séquelles de l'accident ?

MILIO : Ecoute, je ne vois pas pourquoi tu te fais du souci pour elle. Tu ne devrais même pas y penser. Elle n'en vaut pas la peine.

SIRIA : Mais c'est aussi une victime…

MILIO : Une victime ? ! Siria, tu as failli nous quitter à cause d'elle. Tu as beaucoup souffert, et tu n'es pas encore tout à fait rétablie. C'est la faute de cette Mlle Perkins et de son alcool. J'espère qu'elle ira pourrir en prison le plus longtemps possible.

SIRIA : Tu veux dire qu'elle est en prison ? Elle a été arrêtée.

MILIO : Mais bien sûr qu'elle a été arrêtée. Qu'est-ce que tu t'imaginais ? Qu'on allait la remercier pour ce qu'elle t'as fait ?

SIRIA : Tu ne devrais pas être aussi amer vis-à-vis d'elle, Milio. Tu as donc oublié ce que Maman a subit et nous a fait subir lorsqu'elle était alcoolique ? C'est la même chose pour Mlle Perkins. Elle ne sait pas ce qu'elle fait en ce moment. Elle est en plein conflit avec elle-même et elle a besoin d'aide.

MILIO : Tu es vraiment trop bonne avec les gens. Mais si tu veux un conseil de ton grand frère, écoute bien : ne pense plus à cette Jillie Perkins…

 

 16  À L'AÉROPORT DE LOS ANGELES


Il règne un brouhaha indescriptible dû aux départs. Beaucoup de monde se pressent dans les couloirs. Nanne, fait enregistrer sa valise. Un peu plus loin, Tim prend un verre dans une cellule qui sert de café. Nanne, ayant terminé l'enregistrement, adresse un sourire à l'hôtesse et quitte le comptoir d'enregistrement. Ses pas la mènent près du café et c'est là qu'elle aperçoit Tim. Ce dernier croise son regard, gêné. Les lèvres serrées, Nanne va à sa rencontre. Tim se lève pour l'accueillir.

TIM : Nanne ! Quelle surprise ! Mais qu'est-ce que tu fais là ?

NANNE : A ton avis ? Je pars à New York.

TIM : Tu vas passer le week-end chez tes parents ?

Nanne ne répond pas.

TIM : Nanne, je voulais te dire que j'étais désolé de m'être laissé emporter la dernière fois à Great Garden, je…

NANNE (d'un ton sec) : N'en parlons plus.

Tim regarde sa montre.

TIM : Je t'aurais bien invité à prendre un verre, mais….

NANNE (toujours d'un ton sec) : Je n'ai pas soif. On peut savoir où tu vas ?

TIM : Je vais voir un cousin à…

Tim hésite. Il regarde devant lui et voit sur un panneau de contrôle le nom de la ville de Detroit.

TIM : …Detroit. D'ailleurs, il faut que j'embarque maintenant. (Tim lui sourit). Passe un bon week-end.

NANNE : Ouais, c'est ça.

Tim prend congé d'elle et se dirige devant la porte d'embarcation pour Detroit. Il est nerveux et regarde derrière lui pour voir si Nanne est toujours là. Comme il l'aperçoit encore, il se met dans la file d'attente. Elle n'est pas longue, il n'y a que deux personnes devant lui. Il piétine d'impatience, regarde à nouveau. Nanne est en train de refaire son lacet. Plus qu'une personne devant lui.

C'est à son tour. L'hôtesse tend la main pour prendre le billet de Tim. Tim se retourne une dernière fois.

L'HÔTESSE : Monsieur, s'il vous plaît.

Nanne n'est plus dans son champ de vision. Ignorant l'hôtesse et sa main tendue, il court de toutes ses jambes dans l'aéroport et arrive, in extremis, à une autre porte d'embarcation. Il est le dernier passager. Hors d'haleine, il donne son billet à l'hôtesse.

L'HÔTESSE : Encore un peu, et l'avion partait sans vous.

Tim s'engouffre dans le passage qui mène à l'avion. Le panneau de contrôle de la porte d'embarquement indique qu'il s'agit d'un vol pour Las Vegas.

 

 17  DANS UNE SALLE DE GYM


Quelques courageux s'entraînent, avec, en fond sonore : la chanson "Strong enough", interprétée par Cher. Parmi les courageux, on retrouve Gil et Frank. Gil est aux haltères et Frank travaille ses abdos. Ils transpirent à grosses gouttes.

GIL : Non ! tu as osé faire ça à Beth !

FRANK : Et comment !

Gil se met à rire. Il achève sa série.

GIL : La faire coucher sur un matelas à même le sol… J'aurais bien aimé voir la figure qu'elle faisait.

FRANK : Tu n'aurais pas été déçu.

Pendant que Frank termine ses abdos, Gil aborde l'exercice pour renforcer ses quadriceps.

GIL : Je n'arrive pas à comprendre comment vous pouvez encore vivre sous le même toit tous les deux. Ca doit être infernal.

FRANK : C'est une question d'habitude.

Maintenant, Frank manipule un ressort pour travailler les doigts de sa main.

GIL : Est-ce qu'il t'arrive de penser à Menley ?

Frank arrête son exercice, surpris.

FRANK : Pourquoi tu me poses cette question ?

GIL : Oh, comme ça… En fait, Lacey et moi avons eu une petite conversation à votre sujet.

FRANK : Tiens donc…

GIL : Oui. Dis-moi Frank, est-ce que tu tiens encore à elle ?

FRANK : Tu parles si j'y tiens encore Gil ! Il n'y a pas une minute où je ne pense pas à elle.

GIL : Alors, qu'est-ce que tu attends ?

FRANK : Mais elle ne veut plus rien savoir de moi, Gil. Elle m'a bien fait comprendre que c'est terminé entre nous.

GIL : Entre nous, Frank, tu as fait une sacrée bêtise en la quittant à New York.

FRANK : J'avais mes raisons.

GIL : Ca, je ne veux pas le savoir, mon gars.

Il termine sa série et s'approche de Frank.

GIL : Tu t'y prend vraiment très mal avec les filles. Si tu veux reconquérir Menley, fais-le. Donne-toi les moyens de le faire. Agis ! Harcèle la s'il le faut, dis-lui tes sentiments… dis-lui que tu l'aimes. Achète lui des fleurs… je ne sais pas, mais (il appuie sur les mots qui suivent) fais quelque chose !

 

 18  AU CABINET BURNSTEIN, DANS LE BUREAU DE STUART


Stuart planche sur un dossier, derrière son bureau. La porte est ouverte et Menley se tient dans l'encadrement. Elle frappe un petit coup et Stuart lève la tête, surpris de voir la jeune femme.

STUART : Menley !

MENLEY : Votre secrétaire n'est pas là. C'est pourquoi je me suis permise de venir directement vous voir.

On ne peut pas dire que Stuart soit enchanté de voir celle qui se mêle de ce qui ne la regarde pas. Il ne l'invite même pas à entrer. Menley pénètre dans le bureau de son propre chef.

STUART : Que voulez-vous Menley ?

MENLEY : Je voudrai vous parler d'une chose qui me tracasse, Stuart.

STUART : J'ai beaucoup de travail en ce moment, vous savez…

MENLEY : Ce ne sera pas long.

Stuart soupire.

STUART : Je vous écoute.

MENLEY : Parlez-moi de Samantha Strombaski.

Le visage de Stuart pâlit par la surprise, puis il se crispe de colère.

STUART : Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

MENLEY : J'ai parlé récemment à Jane…

STUART : Cette sorcière… Et qu'est-ce qu'elle vous a raconté ? (Il lève la main). Non, ne me le dites pas, je connais la réponse. Elle vous a dit que j'avais tué sa sœur, n'est-ce pas ?

Menley hoche la tête.

MENLEY : Je suis venue pour éclaircir cette affaire, Stuart. Comprenez que je me fais du soucis pour Kelly…

STUART (l'interrompant) : Mais qu'est-ce que Kelly vient faire dans l'histoire de Samantha… (Soudain, il comprend). Oh, non… oh mais c'est pas vrai. (Il commence à rire). Vous croyez que j'ai tué Kelly, c'est ça ? !

MENLEY : C'est moi qui ai trouvé la serviette tâchée de sang dans votre container à poubelles.

STUART : Merci pour votre confiance, Menley. Mais si vous réfléchissez bien, et je suis sûr que parfois ça peut vous arriver, vous devriez vous dire qu'une personne comme moi, qui connaît toutes les ficelles de la justice, n'irait sûrement pas mettre dans un container, à la vue de tous, des pièces compromettantes.

MENLEY : Parfois, dans ce genre de cas, on agit sous l'impulsion du moment.

STUART (il commence à s'exaspérer) : Vous êtes complètement folle !

MENLEY : Je suis juste venue chercher des réponses à mes questions.

STUART : Et de quel droit, Miss Marple à la manque ?

MENLEY : Parce que Kelly était mon amie.

STUART (étonné) : Etait ? ! Vous allez vite en besogne, ma chère. Si vous voulez tout savoir, pour Samantha, c'était un accident, un pur et simple accident. On avait trop bu tous les deux, et Samantha est tombée dans le lac. Je n'ai rien pu y faire, il faisait trop nuit.

Menley a le ricanement d'une personne qui n'en croit pas un mot.

STUART : Je crois avoir été assez gentil de vous avoir donné une réponse, alors que je n'en était même pas obligé. Et maintenant, sortez !

MENLEY : Je vous promets que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour prouver que vous avez tué votre femme.

Stuart se lève, en proie à une colère folle.

STUART : Mais c'est pas vrai ! Vous êtes vraiment malade ! Je vous prierai désormais de ne plus m'importuner avec vos salades de détective à la petite semaine. Je ne veux pas savoir comment vous avez réussi à contacter Jane Strombaski, mais une chose est sûre Menley : si vous continuer à me persécuter de la sorte, je vous colle un procès carabiné pour atteinte à la vie privée, calomnie et d'autres choses que je trouverai bien encore. N'oubliez pas que je suis avocat…

MENLEY (sourire forcé) : C'est une menace ?

STUART : Prenez plutôt ça comme une promesse, Menley. Retournez à vos fourneaux, à vos copies à corriger et fichez-moi la paix, sinon vous le regretterez amèrement. Et maintenant, sortez de mon bureau, sortez de ce bâtiment et sortez de ma vie. Si vous ne décampez pas tout de suite, j'appelle la sécurité.

MENLEY : Inutile d'appeler la sécurité, je m'en vais. En vous voyant agir de la sorte, j'ai la réponse à ma question. Au revoir.

 

 19  APPARTEMENT DES LAYTON


Beth arrive au même moment où Frank zappe sur un programme sportif. Elle est couverte de colis. Elle en a au moins 6. Elle sourit.

BETH : Bonjour, chéri. Tu as passé une belle journée ?

Frank ne répond pas et continue de regarder son programme. Beth se pointe devant lui avec les paquets. On peut voir inscrit sur un paquet Christian Dior, et sur un autre Nina Ricci.

FRANK : Qu'est-ce que c'est que ça ?

Beth sort l'ensemble Christian Dior, très élégant et le montre sur elle à Frank.

BETH : Tu aimes ?

FRANK : Je suppose qu'il y a en a pour une pour une fortune, dans ces paquets.

BETH (souriante) : 2500 dollars au total. Heureusement que j'avais la carte.

Frank fronce les sourcils.

FRANK : Quelle carte ?

BETH (innocente) : Ben la carte de crédit, voyons.

FRANK : De quel droit tu te permets de faire des achats sur ma carte de crédit !

BETH : Tututute… Notre carte de crédit, mon chéri. Je me suis bien renseigné sur ce sujet. C'est peut être TON lit, mais c'est NOTRE carte de cré-dit.

FRANK : Avec MON argent ! Je te prie de bien vouloir aller rendre tout ceci, et maintenant.

BETH : D'accord, j'y vais tout de suite…

Frank est surpris de voir que Beth n'émet pas de protestation. Mais sa surprise n'est pas de longue durée puisque Beth reprend :

BETH : … à condition que je dorme à nouveau dans notre lit, et que j'abandonne définitivement ce vieux matelas.

Elle sourit et cligne des yeux comme un enfant qui a eu se qu'il voulait.

 

 20  À LAS VEGAS, DANS UN CASINO


Nous entrons dans l'antre des jeux : la grande salle de jeux avec la roulette. Tim est devant le tapis vert. Il transpire et rit : il gagne. Un attroupement de curieux se forme autour de lui. On remarque tout particulièrement une jeune femme d'environ 25 ans, blonde et pulpeuse, qui ne cesse de le regarder avec un sourire. Il pose une bonne quantité de jetons sur le 6 rouge et pair. La roulette se met à tourner et la bille se fixe sur le 6. Tim exulte. Les gens autour de lui applaudissent. C'est alors que le regard de Tim croise celui de la blonde plantureuse. Il prend alors le verre de champagne posé près du tapis et le lève, comme pour la saluer, avant de boire. La blonde continue de lui sourire.

 

 

 21  DANS LA SUITE DE MLLE JUDICAL, À GARDEN VIEW


Mlle Judical, accompagnée par Joe, entrent dans la suite avec Jillie, visiblement épuisée par toutes ces histoires. Ils sont accueillis par Flora. Comme pour décharger Mlle Judical d'un grand poids, elle prend d'emblée Jillie sous sa coupe.

FLORA : Venez Jillie. Comment allez-vous ?... J'ai préparé le lit de la chambre d'amis. Vous y serez très bien.

Jillie se laisse conduire par l'aveugle. Elles montent à l'étage. Mlle Judical est désormais seule avec Joe. Elle a l'air triste et fatigué.

JOE : Alice, ça ne va pas ?

MLLE JUDICAL : Pourquoi cette question ?

JOE : On aurait dit que vous avez enterré dix de vos amis aujourd'hui. Vous êtes pâle comme un cachet d'aspirine.

MLLE JUDICAL (se forçant à sourire) : Merci pour les compliments, mon vieux.

JOE : Je ne plaisante pas, Alice. Vous n'avez pas l'air en forme.

MLLE JUDICAL : C'est toute cette affaire qui me remue. Et j'avoue que je suis fatiguée.

JOE : Je crois surtout que vous avez besoin de manger pour avoir des forces. Je vous emmène au restaurant.

MLLE JUDICAL : Merci Joe, vous êtes gentil, mais je crois que j'ai besoin de repos.

JOE : Vous pouvez très bien vous reposer au restaurant.

MLLE JUDICAL : Mais Jillie…

JOE : Jillie est avec Flora. Vous n'avez aucun soucis à vous faire.

MLLE JUDICAL : Vous aimez avoir le dernier mot, n'est-ce pas ?

JOE : Tout à fait.

MLLE JUDICAL : Et bien cette fois, vous ne l'aurez pas… C'est moi qui vous invite dans le meilleur restaurant de la ville et vous n'avez pas le droit de refuser.

JOE (l'air faussement résigné) : Puisque vous insistez.

Ils quittent la suite en riant de bon cœur.

 

 22  DEVANT L'ASCENSEUR, À GARDEN VIEW


Menley et Lacey tiennent chacune un sachet de commission dans les mains. Menley doit tant bien que mal équilibrer le sachet sur une seule main pour appuyer sur le bouton de l'ascenseur avec l'autre.

LACEY : Heureusement que le supermarché était encore ouvert à cette heure, je n'avais plus rien à la maison. Avec toutes tes histoires sur Stuart, je n'ai pas eu le temps de faire les courses depuis quatre jours.

MENLEY : C'est un reproche ?

LACEY : Oui.

Il n'y a rien de méchant dans cette conversation. Au contraire, elles se taquinent. L'ascenseur s'ouvre et les deux femmes y entrent.

MENLEY : Je t'assure Lacey, il avait des yeux vraiment bizarre. Ca m'a même fait peur.

LACEY : Tu parles de Stuart, je suppose.

MENLEY (hochant la tête) : Tu aurais dû voir l'accueil qu'il m'a réservée. Il était hors de lui. Et là, j'ai compris qu'il avait vraiment quelque chose à se reprocher. Stuart a fait du mal à Kelly, comme il a fait du mal à Samantha, tu ne me l'enlèvera pas de l'esprit.

LACEY (ironique) : Oh ça, pour te faire enlever quelque chose de ton esprit…

MENLEY : Il m'a pratiquement mise à la porte. Il a même menacé d'appeler la sécurité.

LACEY : C'est pas parce que tu as un tout petit peu exagérée avec lui ?

MENLEY : Tu prends sa défense, maintenant ?

On entend le cling de l'ascenseur, les portes s'ouvrent sur le palier.

La façon dont Lacey tient son sachet de commission est un effet des plus comiques. Elle essaie de le maintenir en équilibre tout en tirant la langue et en louchant devant tant de concentration.

LACEY : A mon avis, tu devrais oublier toute cette histoire.

Elles arrivent devant la porte d'entrée de l'appartement de Menley et découvrent, juste devant, un énorme bouquet de roses rouges, accompagné d'une carte.

LACEY : Et voilà peut être le moyen de le faire.

MENLEY : Mais qu'est-ce que c'est ?…

LACEY : Un bouquet de fleurs.

Menley regarde Lacey d'un air faussement las, comme si elle aurait voulu dire "toi, tu n'en rate jamais une". Lacey hausse les épaules comme si elle aurait voulu dire "et oui, on ne me changera pas".

Menley prend le bouquet, le respire à plein poumons et le repose. Elle prend alors l'enveloppe contenant la carte. Tout de suite, Lacey regarde par dessus l'épaule de Menley lorsque celle ci ouvre l'enveloppe. Sa curiosité est grande de savoir qui peut bien offrir les fleurs à son amie.

Sentant la présence de Lacey derrière son épaule, elle se tourne vers elle et lui jette un gentil regard de reproches. Lacey recule et lève les mains.

LACEY : Tu as raison, pardon… Tout le monde à droit au respect de sa vie privée…

Menley lit le mot sur la carte. Lacey, toujours aussi curieuse, n'abandonne pas.

LACEY : Alors c'est qui ?

Menley ne répond pas. Elle continue de regarder la carte. Tant pis, la curiosité de Lacey est plus forte que tout : elle avance et regarde à nouveau par dessus l'épaule de son amie, pour lire le mot. Soudain, elle saute de joie et crie.

LACEY : Ah, je le savais, je le savais, qu'elles étaient de Frank, ces fleurs.

MENLEY : Lacey, calme toi… calme toi. Tu vas ameuter tout Garden View en piaillant comme ça.

LACEY (toujours excitée) : Mais c'est formidable. Frank se décide enfin à te reconquérir. Il était temps…

Menley lui jette un regard de reproche et Lacey se calme.

LACEY : OK, OK… je me calme. Mais avoue que c'est génial. Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant ?

MENLEY : Essayer de savoir ou Stuart a pu cacher le corps de Kelly.

LACEY (soupirant) : Oh, non…

 

 23  RETOUR AU CASINO AVEC TIM


Il exulte. Devant son "public", il gagne. Soudain, il prend les jetons.

TIM : Terminé pour ce soir.

Il se retourne et part avec sa masse impressionnante de jetons dans la main. En route, il croise la jeune fille qui n'arrêtait pas de le regarder. Tim lui sourit.

TIM : Bonjour, belle dame.

AMY : Bonjour, gentil monsieur.

TIM : Je m'appelle Tim.

AMY (lui tendant la main) : Amy.

Mais Tim ne peut pas prendre la main d'Amy, parce qu'il est trop chargé de jetons. Cette situation fait rire nos deux protagonistes.

TIM : Enchanté, Amy. Mais dites-moi, qu'est-ce qu'une belle fille comme vous fait dans un endroit pareil ! Et seule en plus… parce que vous êtes seule, je me trompe ?

AMY (soupirant) : Oui. Je me suis disputée avec mon petit ami tout à l'heure et… il est parti sans moi.

TIM : Vous voulez dire qu'il vous a plaqué ici… Quel con, ce type.

AMY : De toute façon, il n'en valait pas la peine.

TIM : Et qu'est-ce que vous allez faire, maintenant ?

Amy hausse les épaules, l'air de dire qu'elle ne sait pas.

TIM : On pourrait peut-être discuter de vos problèmes devant un bon verre, qu'est-ce que vous en dite ?

AMY : J'en dis que vous allez sans doute me faire oublier tous mes soucis.

Elle lui sourit.

 

 24  AU RESTAURANT "MARINA BAY", EN SOIRÉE


Mlle Judical est installée avec Joe à une table à l'écart. L'ambiance est feutrée. On se sent bien dans ce restaurant chic. Une musique très douce accompagne les conversations des convives. Toutes les tables du restaurant sont de forme ronde. Les murs sont ornés d'une tapisserie rouge et or conférant à la salle une ambiance intimiste.

JOE : Merci, vraiment merci pour cet excellent repas et cette excellente soirée.

MLLE JUDICAL (souriant) : Merci à vous. Un instant, vous m'avez fait oublié ma fatigue et mes soucis.

JOE : Je peux le faire plus souvent si vous voulez. (un silence pendant lequel il observe Mlle Judical, puis il reprend) Je vous admire beaucoup.

MLLE JUDICAL (surprise) : Pourquoi donc ?

JOE : C'est la façon dont vous vous impliquez dans les problèmes de vos employés. Après tout, Jillie Perkins n'est qu'une employée pour vous. Mais on a l'impression que les membres de l'Unecain font tous partie de ma famille.

MLLE JUDICAL : L'Unecain, c'est ma famille, Joe. J'y ai consacré tout mon temps… toute ma vie. J'y ai pratiquement investie toute mon âme.

JOE : Il est peut être temps que ça change.

MLLE JUDICAL : Que voulez vous dire ?

JOE : Qu'il est temps pour vous de vivre une nouvelle vie. Une vie de bonheur. Une vie que vous pourrez savourer à plein poumon, croquer à pleine dents. Vous méritez de connaître un tas de choses, un tas de gens, de voyager et de ne plus vous cantonner dans votre bureau. Vous allez y étouffer, Alice.

Mlle Judical baisse la tête vers sa tasse de café.

JOE : Vous n'avez toujours pas répondu à ma demande.

MLLE JUDICAL : Pardon ?

JOE : L'autre jour, dans la mongolfière, je vous ai demandé de m'épouser, Alice. Vous ne m'avez toujours pas donné de réponse. Que se passe-t-il ?

MLLE JUDICAL (levant les yeux vers lui) : Je suis fatiguée, Joe. J'aimerai partir maintenant.

JOE : Demain, c'est dimanche. Vous aurez tout le temps pour vous reposer.

MLLE JUDICAL : Demain, je dois m'occuper de Jillie.

JOE : Vous vous impliquez de trop Alice.

MLLE JUDICAL : Joe, il faut partir maintenant.

Visiblement, Mlle Judical veut couper court à cette conversation. On a l'impression qu'elle fuit. Joe le devine aussi et il pousse un soupir en se levant.

JOE (déçu) : Alors allons-y.

 

 25  DANS L'APPARTEMENT DE MENLEY, TARD LE SOIR


Menley est assise à la table de la pièce principale, en train de corriger des copies. On sonne à la porte. Intriguée, elle ne veut d'abord pas ouvrir. Puis on sonne une deuxième fois. Résignée, elle va ouvrir en soupirant.

MENLEY : Qui ça peut être à cette heure ?

Elle ouvre et tombe nez à nez sur un clown. Elle recule d'un pas, marquant sa surprise.

MENLEY : Je crois que vous vous êtes trompé d'appartement, Monsieur.

Le clown fait un pas en avant, embrasse Menley sur la joue. Elle sourit, ne comprenant pas du tout ce qui lui arrive. Le clown, qui ne parle pas, mime. Ses gestes veulent dire qu'il souhaiterait boire quelque chose.

MENLEY : Un verre ?… Vous voulez boire ?

Le clown fait oui de la tête avec un grand sourire.

MENLEY : Mais c'est qu'il est très tard.

Le clown affiche un air triste. Menley l'observe bien.

MENLEY : C'est bizarre, mais il me semble que je vous connais.

A nouveau, le clown fait oui de la tête avec un large sourire. Puis il lui fait un clin d'œil. Menley reconnaît alors l'homme.

MENLEY : Oh, non…

Le clown enlève son gros nez rouge.

MENLEY : C'est pas vrai !

Puis il enlève son chapeau blanc en forme de cône.

MENLEY : Frank ! Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ? Je peux savoir ce que tu fiches ici à cette heure, et habillé comme ça ?

FRANK : Je voulais simplement te faire comprendre que je ne suis qu'un clown.

MENLEY : Ca tu l'as dit.

FRANK : Menley, j'ai très mal agis envers toi. Je suis un clown triste. Un clown triste parce que j'ai fait du mal à la personne qui compte le plus pour moi.

MENLEY : Frank, arrête… Tout ça c'est du passé. N'en parlons plus.

FRANK (plein d'espoir) : Alors, tu me le donne, ce verre ?

MENLEY : Non, mais je vais te donner autre chose.

Frank sourit. Menley fait quelques pas et va chercher le bouquet de fleurs qu'elle avait trouvé devant son appartement. Elle le tend à Frank, qui a bien entendu cessé de sourire, et affiche maintenant un visage déçu.

MENLEY : La couleur de ces fleurs ne vont pas avec la déco de l'appartement. Désolée.

En même temps qu'elle donne les fleurs à Frank, elle le pousse vers l'extérieur…

MENLEY : Bonne nuit.

… et ferme la porte.

 

 26  LE MATIN, DANS UN MOTEL PRÈS DE LAS VEGAS


Tim est couché dans le lit. Au pied du lit se trouve deux bouteilles de champagne vides, dont une renversée. Doucement, Tim émerge de son lourd sommeil. Il cligne des yeux car la lumière du jour lui fait mal. Lentement, il se met assis sur le lit. Il reprend ses esprits en se frottant les yeux et se massant la tête.

TIM : Amy ?

Pas de réponse. Il se lève et une fois debout, la tête lui tourne.

TIM : Oh la, il va falloir que je me calme sur la bouteille.

Il regarde autour de lui.

TIM : Amy ? Amy tu es là.

Ses yeux se portent alors sur la petite commode, près de la porte. En parfait contraste avec ses gestes lents de tout à l'heure, il se dirige d'une allure vive vers elle. Il regarde partout, paniqué. Puis donne un grand coup de pied dans la commode, de rage.

TIM : La garce !

 

 27  TIM À LA RéCEPTION DU MOTEL


Le gérant du motel, devant son comptoir, n'est guère accueillant. Une cigarette au bec, il regarde un Tim nerveux avec une grimace. La réception est sale et l'infrastructure ressemble à celle de la réception du motel de Norman Bates dans le film d'Hitchcock "Psychose".

LE GERANT : Je vous dis que ça fait 50 dollars.

TIM (nerveux) : Mais vous n'avez pas compris ce que je vous ai dit : la fille qui était avec moi m'a piqué tout mon fric, et même mes papiers.

LE GERANT : Dis donc, mon gars. Sois un peu plus original.

TIM : Quoi ?

LE GERANT : Si tu savais combien de fois on m'a fait ce coup là ! Mais ça marche pas avec moi. Alors soit tu me files les 50 bifetons, soit j'appelle les flics.

TIM : Ecoutez, je m'appelle Tim O'Connell et je suis professeur à l'Unecain de Garden Place.

LE GERANT : Et moi je suis le Président des Etats-Unis.

TIM : Je voudrai téléphoner.

Tout en regardant Tim droit dans les yeux, le gérant donne le combiné du téléphone. Tim, tremblant, compose un numéro. Une sonnerie… deux sonneries… le gérant continue de fixer Tim dans les yeux. Trois sonneries…

TIM : Allez, décroche, bon sang !

Quatre sonneries… puis le répondeur. Tim ferme les yeux.

VOIX DE BETH : Vous êtes bien chez les Layton de Garden Place. Personne n'est là pour l'instant…

Tim n'attend pas la fin du message et raccroche. Le gérant continue à le fixer. Tim appuie ses coudes contre le comptoir et se tient la tête avec ses mains, l'air découragé.

LE GERANT : Ca fait 52 dollars.

Doucement, Tim lève les yeux vers lui sans comprendre. Le gérant lui met les points sur les i :

LE GERANT : 50 la chambre, et 2 dollars pour l'appel.

TIM (désemparé) : Oh, mon Dieu, mais c'est un cauchemar. Je suis en train de rêver et je vais me réveiller.

LE GERANT : Vous rêvez pas, mon gars. C'est 52 dollars. Et je vous préviens, je fais pas crédit.

On entend alors une voix en provenance d'une autre pièce qui appelle le gérant. On peut deviner qu'il s'agit de sa femme.

VOIX OFF DE LA FEMME : Juju !

LE GERANT (criant comme quelqu'un qui ne veut pas être dérangé) : Quoi ? !

LA FEMME : Viens voir !

LE GERANT (criant) : J'peux pas, j'suis avec un client qui veut pas payer.

Tim se prend à nouveau la tête entre les mains et dit d'une voix lasse :

TIM : Je ne PEUX pas payer.

LA FEMME : Viens, j'te dis ! La télé marche plus.

LE GERANT : Si t'arrêtais un peu de regarder tes feuilletons débiles le matin…

LA FEMME : La ferme ! Et viens !

Après une hésitation, le gérant regarde Tim.

LE GERANT : Toi, mon gars, tu restes là.

Le gérant va dans l'autre pièce en maugréant.

LE GERANT : Ces bonnes femmes, alors…

Seul, Tim regarde autour de lui. Il prend la porte et sort du motel.

Dans la rue, il court de toutes ses forces, bousculant des gens au passage, passe dans une rue, puis dans une autre.

 

 28  CHAMBRE DE SIRIA À L'HÔPITAL


Siria, assise sur son lit, parcours un livre lorsque l'inspecteur Follet arrive. Il toque à la porte et entre.

FOLLET : Siria, comment allez-vous ?

SIRIA : Beaucoup mieux maintenant, inspecteur.

FOLLET : Quelque chose ne vas pas ? Enfin, je veux dire, pourquoi m'avez vous fait demander ?

SIRIA : C'est au sujet de Mlle Perkins.

Follet s'assied sur une chaise à côté d'elle.

FOLLET : Je vous écoute.

SIRIA : J'aimerai d'abord savoir comment elle va. Personne ne veut me parler d'elle.

FOLLET : Elle va aussi bien que possible.

SIRIA : J'ai entendu dire qu'elle était en prison.

FOLLET : On a payé sa caution. Elle est sortie maintenant.

SIRIA : Inspecteur, je ne veux pas que Jillie Perkins paie aussi cher son ardoise.

FOLLET : Je ne comprends pas.

SIRIA : Je voudrai que les charges qui pèsent contre elles soient levées.

FOLLET : Mais Siria, ce n'est pas si simple.

SIRIA : Mlle Perkins a déjà beaucoup souffert de cette histoire. Elle a simplement besoin d'aide, pas de prison.

FOLLET : Elle a conduit en état d'ivresse, ne l'oubliez pas. Ce qui veut dire qu'elle a mis la population en danger. Vous en avez payé le prix, je crois. On ne peut pas laisser passer ça. Imaginez qu'elle recommence.

SIRIA : Justement Inspecteur. Je ne veux pas que ça recommence. Mais la méthode que vous employez à toujours vouloir mettre les gens en prison me révolte.

FOLLET : C'est notre législation qui veut cela, jeune fille.

SIRIA : Ce n'est pas juste, inspecteur.

FOLLET : Vous voir dans un lit d'hôpital n'est pas juste non plus.

Siria ne répond pas. Follet poursuit.

FOLLET : Que voulez-vous au juste ?

SIRIA : Je voudrais qu'on aide Mlle Perkins d'une autre manière. Je sais qu'elle a besoin d'aide. Il faudrait qu'elle accepte de se faire soigner dans un centre pour son problème d'alcool. Elle a un très bon fond, vous savez. Lorsqu'elle ne boit pas, elle peut être formidable.

Follet sourit. Il se lève.

FOLLET : C'est vous qui avez un trop bon fond… Je vais voir ce que je peux faire.

SIRIA : Merci, Inspecteur.

 

 29  UNE ROUTE DANS LE DÉSERT


Tim marche sur le bord d'une route. Il est épuisé, sa chemise sort de son pantalon et il transpire à grosses gouttes. Le soleil tape. Autour de lui, plantés par ci par là, quelques arbres et quelques cactus. Mais rien à l'horizon, si ce n'est cette route qui semble ne plus finir.

Tim entend un bruit de moteur. Il se retourne. Une voiture arrive. Il la hèle de toute ses forces… Mais la voiture passe devant lui, projetant au passage de la poussière sur lui. Il enrage.

TIM : Et merde !

Il poursuit sa route. Une nouvelle voiture arrive, qu'il hèle à nouveau. Cette fois, la chevrolet mauve s'arrête. Tim expire de soulagement. Il court au devant de la voiture arrêtée quelques mètres plus haut.

TIM : Enfin quelqu'un d'assez aimable pour s'arrêter.

Trois personnes sont dans la décapotable. Le sourire de Tim s'efface car nos trois compères ont l'air d'être tout, sauf aimable. Le conducteur, habillé en cuir, le regarde avec un rictus. Il a une énorme cicatrice sur la joue droite. Le passager n'est guère mieux. Enorme boucle d'oreille sur le nez, il écoute du hard rock via un baladeur. Quant au troisième, derrière, il a l'air totalement surexcité. Il n'arrête pas de se dandiner en ricanant. Le conducteur s'adresse à Tim.

LE CONDUCTEUR : T'as un problème, mon gars ?

TIM (pas rassuré) : Je…euh… oui… je suis tombé en panne et …

LE SUREXCITE (riant) : Il est tombé en panne…

TIM : Oui… et… enfin je me demandais…

Pendant le discours inaudible de Tim, le conducteur descend de la voiture, et se dirige vers Tim.

TIM : … si vous pourriez me déposer à la… (le conducteur est maintenant près de Tim. Ce dernier n'en mène pas large) …station la plus proche…

LE SUREXCITE : La station la plus proche.

LE CONDUCTEUR : Oh, mon ami, ça ne sera pas gratuit, tu sais ça ?

TIM : Ecoutez, je n'ai pas d'argent sur moi…

LE SUREXCITE : Il a pas d'argent…

TIM : Mais je peux vous payer plus tard…

LE SUREXCITE : Il peut payer plus tard…

LE CONDUCTEUR : C'est qu'on fait pas crédit, tu vois.

Le passager enlève les écouteurs de son oreille et regarde le conducteur.

L'HOMME AU WALKMAN : Eh, qu'est-ce que tu fous ?

LE CONDUCTEUR (toujours en regardant Tim) : Ce mec a fait arrêté ma bagnole pour qu'on l'aide, et il a même pas de fric sur lui.

LE SUREXCITE : Il a pas de fric… il a pas de fric…

L'homme au walkman descend de la voiture. Il se pointe devant Tim.

L'HOMME AU WALKMAN (à Tim) : C'est vrai, ça ?

Tim commence vraiment à paniquer.

TIM : Ecoutez, les gars. Oublions tout ça, vous voulez. Après tout, je peux marcher encore quelque… (il regarde la route qui n'en finit plus) … kilomètres. Vous feriez mieux de repartir maintenant.

LE CONDUCTEUR (toujours en fixant Tim) : Mais c'est qui nous donnerait des ordres, ce Monsieur ?

L'HOMME AU WALKMAN : Ouais, et on aime pas recevoir des ordres…

LE CONDUCTEUR : Ouais.

TIM (qui se fait tout petit) : Ce n'était pas un ordre, vous savez…

LE SUREXCITE (toujours assis derrière) : C'était pas un ordre…

LE CONDUCTEUR : Ouais, moi je crois que c'était un ordre. Qu'est-ce que t'en penses, Chuck ?

L'HOMME AU WALKMAN : Ouais, c'était un ordre.

LE SUREXCITE : C'était un ordre… c'était un ordre…

TIM :Ecoutez, laissez-moi partir tranquille et comme ça…

LE CONDUCTEUR : Mais c'est qu'il nous donne encore un ordre. Ca fait le deuxième.

LE SUREXCITE : Le deuxième… le deuxième…

LE CONDUCTEUR (regardant Tim mais s'adressant à Chuck) : Qu'est-ce qu'on fait ?

L'HOMME AU WALKMAN : Il a droit à un gage.

LE CONDUCTEUR (souriant) : Ouais. Qu'est-ce que tu penses d'une petite danse, pour cette petite tapette ?

LE SUREXCITE : Oui… une danse… une danse…

Le conducteur sort alors un pistolet calibre 38 de l'intérieur de son blouson en cuir. Là, Tim panique vraiment.

TIM : Non… non…

L'HOMME AU WALKMAN : T'aime pas danser…

Tim ne répond rien. Il se contente de fixer le 38 avec de grands yeux. Sans réponse, le conducteur pointe à une vitesse grand V le pistolet sur Tim, qui sursaute tant il a peur.

LE CONDUCTEUR : On t'a jamais dit que c'était pas poli de pas répondre aux gens ?

TIM (au bord de l'apoplexie) : Si…. Non…. Non… faites pas ça….

LE CONDUCTEUR : Alors, tu réponds à mon copain…

TIM (dans un murmure) : Oui.

L'HOMME AU WALKMAN : T'entends, Bud. Il aime bien danser.

LE SUREXCITE : Il aime danser… il aime danser….

LE CONDUCTEUR : Alors, tu vas danser. Maintenant.

Il pointe le 38 en direction des pieds de Tim et commence à tirer. Tim crie. Il saute sur place pour éviter les balles. Dans la voiture, le surexcité rit d'une manière peu conforme. C'est presque de l'hystérie. Finalement, il n'y a plus de balles dans le 38. Le conducteur essaie trois fois, mais plus rien ne sort.

LE CONDUCTEUR : Plus de balles. Alors t'as aimé ?

Tim, épuisé par le stress et la peur, est à genoux. Il pleure très fort, comme un enfant.

L'HOMME AU WALKMAN : Ouais, il a aimé.

LE SUREXCITE : Il a aimé… il a aimé…

LE CONDUCTEUR : Maintenant, il faut passer à la caisse, mon gars.

L'HOMME AU WALKMAN : Ouais, c'était pas gratuit. T'as dépensé nos balles…

TIM (entre deux sanglots) : Je n'ai pas … d'argent…

LE CONDUCTEUR : C'est pas grave, ça. On accepte le paiement en nature.

Le conducteur s'approche de Tim. Il le fait se lever, lui sourit et lui flanque un grand coup de poing dans l'estomac. Tim s'effondre.. Puis le conducteur se tourne vers ses deux compères.

LE CONDUCTEUR : Allez, on dégage.

Pendant qu'ils regagnent leur place dans la décapotable :

LE SUREXCITE : On dégage… On dégage…

Et la Chevrolet démarre dans une traînée de poussière, laissant Tim au sol.

 

 30  DANS LA SUITE DE MLLE JUDICAL


Elle est installée dans son fauteuil favori, en sirotant un café. Elle est encore en peignoir. Arrive Flora. Avec précaution, elle vient s'asseoir sur le canapé, en face de Mlle Judical.

MLLE JUDICAL : Comme c'est agréable de pouvoir se reposer le dimanche matin.

FLORA : Surtout pour toi, qui travaille de trop.

MLLE JUDICAL : Et Jillie ? Comment va-t-elle ?

FLORA : Elle dort encore, la pauvre. Je crois qu'elle a du sommeil a rattraper… Comment s'est passée ta soirée ?

Mlle Judical ne répond pas.

FLORA : Ouh ouh… je t'ai posé une question.

MLLE JUDICAL : Excuse moi Flora, mais… enfin…

FLORA : Tu n'as pas envie d'en parler ? Il y a un problème avec Joe ?

Mlle Judical n'a pas le temps de répondre, car Jillie arrive dans la pièce. Elle est encore à moitié endormie. Mais elle a repris des couleurs. Mlle Judical se lève.

MLLE JUDICAL : Jillie. Comment allez-vous ? Venez vous asseoir.

Jillie s'exécute. Une fois assise sur le canapé, juste à côté de Flora, Mlle Judical lui sert une tasse de café.

MLLE JUDICAL : Ca va ?

JILLIE : Mieux, maintenant, merci.

FLORA : Oui, ça va… Je le sens dans sa voix.

JILLIE : Il faut maintenant que je m'en sorte. Il faut que je me sorte de cet engrenage. J'ai réalisé que l'alcool pouvait détruire d'une façon monumentale. C'est horrible.

MLLE JUDICAL : C'est bien que vous en ayez pris conscience, Jillie. Je suis heureuse pour vous.

FLORA : Que comptez-vous faire, maintenant ?

JILLIE : Et bien, d'abord me faire suivre par un médecin. Et attendre la décision de justice. Je suis prête à tout pour m'en sortir.

FLORA : Voilà qui est bien parlé.

JILLIE (à Mlle Judical) : Avez-vous des nouvelles de Siria ?

MLLE JUDICAL (souriant) : Oui. Et elle va très bien.

JILLIE : Dieu soit loué... Mlle Judical, il y a une chose que j'aimerai vous demander.

MLLE JUDICAL : Je vous écoute.

JILLIE : Comme je l'ai dit, je veux me sortir de cet enfer, mais je ne pense pas que rester seule à ne rien faire va m'y aider, vous comprenez ?

MLLE JUDICAL : Ou voulez-vous en venir Jillie ?

JILLIE : J'aimerai reprendre mon travail à l'Unecain. Dès demain.

MLLE JUDICAL (qui s'agite dans son fauteuil) : Mais voyons, c'est beaucoup trop tôt. Et puis, n'oubliez pas ce que le conseil d'administration a voté…

JILLIE : C'est important pour moi, Mlle. Un médecin m'accompagnera avant et après chaque cours que je ferai. Je suis un bon professeur… (elle baisse la tête) … quand je n'ai pas bu.

MLLE JUDICAL (soupirant) : Très bien, très bien. Faisons un essai demain. Mais je persiste à dire que ce n'est pas une bonne idée.

 

 31  RETOUR DANS LE DÉSERT


Tim continue de marcher. Il a la bouche pâteuse. On devine qu'il meurt de soif. Il fait toujours aussi chaud dans ce désert de l'Arizona. Il porte sa main sur son estomac, se souvenant du coup qu'il a reçu voici peu de temps.

Soudain, il s'arrête… Au loin, il aperçoit un bâtiment. On peut voir qu'il s'agit d'un café. Tim accélère sa cadence, puis va encore plus vite… puis il court à petits pas tout en riant, heureux d'avoir trouvé ce miracle.

 

 32  DANS LE CAFÉ


Il n'y a que peu de monde dans ce café. Le comptoir et les tables sont en bois, d'aspect fragile d'ailleurs. Le barman est un homme de forte corpulence. Il doit avoir dans les 50 ans. Il ne semble pas très sympathique. Les quatre consommateurs qui sont au comptoir ne parlent pas, de même que le couple qui est assis à une table (la seule qui soit occupée).

Tim fait son entrée. Bien entendu, comme il est sale et que ses vêtements sont à moitié déchirés, tout le monde se retourne sur lui. Il vient au comptoir.

TIM (qui a du mal à parler tant il est fatigué) : S'il vous plaît… Je viens d'être attaqué par trois jeune hommes sur la route…

LE BARMAN (l'interrompant) : Mais qu'est-ce que vous faisiez seul sur la route ?

UN CONSOMMATEUR AU COMPTOIR : Laisse le parler, Gus.

TIM : Je ne peux pas… j'ai très soif.

LE BARMAN : Vous avez de quoi payer ?

TIM : Oh non… ça ne va pas recommencer !

LE CONSOMMATEUR AU COMPTOIR : Laisse Gus, c'est moi qui lui paie un coup. Le pauvre est dans un sale état.

TIM (au consommateur) : Merci. Je voudrai un bon et grand verre d'eau.

Les consommateurs éclatent de rire. Gus, lui, ne laisse rien paraître et verse de l'eau à Tim. Tim ingurgite le liquide comme s'il n'avait rien bu depuis trois jours. Il repose le grand verre.

TIM : Je voudrai pouvoir téléphoner.

Le barman indique d'un signe de tête une cabine téléphonique dans le coin, au fond du bar. Tim s'y rend. Il compose un numéro. A l'autre bout, le téléphone sonne. Une fois... deux fois... puis Beth décroche.

BETH : Oui âllo.

Dans la cabine, Tim marque son soulagement d'avoir Beth en ligne.

TIM : Beth, Dieu soit loué, enfin j'arrive à t'avoir.

Beth est dans son salon, installée comme une reine dans son fauteuil, les pieds sur la table du salon. Visiblement, cet appel la contrarie, voire même l'agace.

BETH : Tim, mais bon sang, qu'est-ce que tu veux ?

TIM : Beth écoute moi bien, c'est très important. Je me suis fichu dans une sacrée merde.

BETH : Ca ne change pas avec toi.

TIM : Non, mais cette fois, c'est vraiment grave.

BETH : Ecoute Tim, j'aurais bien continué cette conversation, je suis en plein ménage, et…

TIM : Non, non Beth, ne raccroche pas, par pitié. Ecoute moi.

BETH : Tim, je ne suis pas ton psy, si tu veux parler, appelle-le.

TIM : Je t'en prie, Beth, écoute ce que j'ai à te dire…

BETH (ne l'écoutant pas) : Et maintenant, fiche moi la paix.

Elle raccroche.

TIM : Beth ? Beth !!

Comprenant qu'il n'a plus Beth en ligne, il raccroche et pose sa tête sur son épaule, l'air découragé. La porte d'entrée s'ouvre et le gérant du motel miteux fait son entrée. Gus l'accueille familièrement.

GUS : Juju, mais qu'est-ce que tu fous ici ?

LE GERANT : Ah ben aujourd'hui, c'est dimanche, je laisse ma doudoune s'occuper du motel et je viens voir mon vieux pote Gus.

Il arrive près du comptoir et lui tape sur l'épaule.

Dans la cabine, Tim lève la tête. Il a entendu la voix du gérant, regarde dans sa direction et ouvre grand les yeux.

TIM : Oh non ! Il ne manquait plus que ça.

LE GERANT : Si tu savais ce qui m'est arrivé ce matin, mon vieux…

Tim essaie de se cacher pour ne pas que le gérant le voit. Il l'observe et voit qu'il fait des gestes expressifs. Il devine qu'il parle de lui et de ce qui s'est passé ce matin.

Soudain, Gus regarde en direction de la cabine téléphonique, imités par les consommateurs au comptoir. Tim voudrait bien se cacher dans un trou. Il met une main devant son visage pour ne pas voir. La porte de la cabine s'ouvre. Tim abaisse sa main. Le gérant est devant lui, avec un sourire.

LE GERANT : Le monde est petit, mon gars, hein ?

 

 33  RETOUR DANS LA SUITE DE MLLE JUDICAL


Elle fait un canevas pendant que Flora lit un livre en braille. Jillie regarde la télévision. Le téléphone sonne. Jillie se lève et décroche.

JILLIE : Allô, oui vous êtes chez Mlle Judical. Ah Joe Krueger, bonjour.

Mlle Judical se tourne brusquement vers Jillie. Elle fait de grands signes en disant qu'elle ne veut pas lui parler. Jillie est embêtée.

JILLIE : C'est à dire… enfin, elle n'est pas là pour l'instant. Je peux peut être lui laisser un message…

Flora lève la tête, surprise.

JILLIE : Très bien, au revoir. (elle raccroche) … Il a dit qu'il rappellera plus tard.

Flora ferme son livre et se lève.

FLORA : Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

MLLE JUDICAL : Simplement qu'on est dimanche et que je souhaite passer cette journée au calme, avec mes deux amies.

Flora hausse les épaules, l'air de vouloir dire qu'elle raconte n'importe quoi.

 

 34  POSTE DE POLICE


Tim est en face d'un policier fort peu sympathique, assis derrière un bureau avec une vieille machine à écrire. Tim a une mine défaite.

TIM : Puisque je vous dis pour la énième fois que je me suis fait voler mon portefeuille avec à l'intérieur tout mon argent et mes papiers.

Le policier, cigare au bec, le regarde d'un air méfiant.

LE POLICIER : Ce que vous me dites là n'a pas de sens, mon gars. Vous êtes SDF.

Tim pousse un soupir d'exaspération.

TIM (élevant la voix) : Mais c'est pas vrai, vous n'entendez pas ce que je dis ou quoi ? Je dois vous parler en Chinois.

Le policier cherche son cendrier sur le bureau où il règne un désordre indescriptible. Ne le trouvant pas, il hausse les épaules et écrase son cigare sur la table. Ensuite seulement, il regarde Tim.

LE POLICIER : Oh, là mon gars. On ne répond pas comme ça à un policier. Je peux vous coffrer pour autre chose que vagabondage.

TIM (il rit jaune) : Mais c'est pas vrai, mais ou je suis tombé encore !

LE POLICIER : Dans un sacré pétrin, mon gars, oui, moi j'vous l'dis.

TIM : S'il vous plaît, laissez-moi téléphoner. J'ai droit à un coup de fil, je crois, non ?

LE POLICIER : Ben ouais.

Il enlève la tonne de papier qui se trouve sur son téléphone et le place en face de Tim.

LE POLICIER : Allez-y.

Tim regarde le policier comme dans un rêve, puis il décroche le combiné et fait le numéro. Une sonnerie, et l'on décroche.

TIM : Ici Tim. Ecoute-moi bien, je t'en prie, ne raccroche surtout pas… j'ai de gros problèmes…

 

 35  DEVANT LE POSTE DE POLICE


Frank descend les marches du palier. Derrière lui, Tim n'en mène pas large, mais semble néanmoins soulagé que sa mésaventure se termine enfin.

TIM : Merci, vieux. Je te revaudrai ça. Je ne sais pas comment ce cauchemar a pu avoir lieu, mais tu es arrivé au bon moment… parce que je crois que ces imbéciles m'auraient coffrés… je ne comprend pas comment on peut élire des idiots pareils… C'est incroyable, mon vieux, incroyable… si ça continue, je ne vais plus payer d'impôts… C'est tout ce qu'ils mériteraient.

Pendant le discours de Tim, Frank ne dit rien. Il marche vite, regardant devant lui. Il fait de grand pas et Tim est presque obligé de courir pour tenir la cadence. Le visage de Frank est impassible, tandis que celui de Tim trahit la honte de s'être fait avoir. Ses tentatives d'explication et son monologue discordant prouvent qu'il est mal à l'aise devant Frank et un peu honteux de la situation actuelle.

TIM : C'est cette fille, Frank. Elle m'a fait du gringue et…

Soudain, Frank se retourne pour faire face à Tim, yeux dans les yeux. Tim se tait immédiatement, intimidé.

FRANK : Ecoute, je me fiche de tes explications, O'Connell. Tout ce que je sais, c'est que tu me dois 500 dollars pour t'avoir fait sortir de cette stupide histoire. Maintenant, tu te tais jusqu'à notre retour, parce que sinon, je ne répond plus de mes actes.

TIM (ne demandant pas son reste) : OK, OK.

 

 36  JILLIE à L'UNECAIN


Elle est devant la porte de sa salle de classe. Elle hésite, respire un bon coup, puis entre. Les élèves sont assis. Ils regardent Jillie s'avancer jusqu'au pupitre. Le professeur regarde droit devant elle. On la sent gênée par les regards des élèves. Finalement, elle gagne le pupitre et s'assoit, prête à affronter les élèves. On devine qu'elle fait un grand effort de maîtrise. Elle prend un livre dans son sac et le pose sur la table en l'ouvrant.

JILLIE : Très bien, nous allons reprendre là ou nous en étions restés la dernière fois. Prenez donc vos livres à la page 161 et Michael viendra au tableau.

Mais les élèves ne bougent pas. Tous les regards sont fixés sur Jillie. Personne ne se lève pour aller au tableau. Jillie, déjà peu sûre d'elle avant, commence à trembler.

JILLIE : Très bien, Michael, s'il te plaît. Au tableau.

Michael fixe Jillie et ne bouge pas. Jillie commence à paniquer. Soudain, Michael commence à murmurer. Ce murmure s'amplifie jusqu'à devenir un "ouh" de honte visant Jillie. Soudain, tous les élèves l'imitent et bientôt, la classe entière émet des "ouh".

LES ELEVES (ensemble) : Ooouuuuuuuuuhhhhhhhhh……

Les "ouh" augmentent d'un ton. Jillie n'en peut plus. Elle se lève brusquement et quitte la pièce précipitamment.

 

 37  DEVANT L'IMMEUBLE DE GARDEN VIEW


Beth sort de l'immeuble, avec un sac poubelle dans la main. Elle porte un pantalon noir très serré et un tee-shirt blanc, tout aussi serré. Elle s'arrête brusquement et regarde les emplacements des containers. Ils sont vides.

BETH : C'est pas vrai, ces imbéciles ont une fois de plus oublié de sortir les containers à poubelles.

Elle hausse les épaules et se dirige alors vers une petite porte, à côté de la grande entrée. Elle pénètre dans le débarras servant à ranger les containers. Toujours son sachet à la main, Beth appuie sur le bouton de l'interrupteur, mais rien ne se passe.

BETH : Et en plus, ils n'ont pas changé l'ampoule… tous des incompétents… des imbéciles et des incompétents !

Beth tâtonne pour trouver un container.

BETH : Oh, quelle poisse.

Soudain, on entend un cri effroyable ! Beth sursaute. Ce n'est pas elle qui a crié, mais elle imite le cri, tant elle a eu peur.

BETH : Qu'est-ce que c'est ? …

Pas de réponse. Le cri se répercute une nouvelle fois. Et une nouvelle fois, Beth sursaute. Elle panique totalement.

BETH : Qui est là ? !

Précautionneusement, elle fait un pas en direction du cri. Elle regarde entre deux containers et ouvre grand les yeux.

BETH (terrorisée) : Oh, Mon Dieu….

Devant elle se trouve Kelly, bien vivante, mais avec un visage apeurée, des cheveux ébouriffés et des yeux ouverts qui regardent dans le vide.

 

 

 GéNéRIQUE DE FIN